Pour retrouver toutes les informations sur cette pièce, cliquez ici.
La Tragédie du sac de Cabrières
- Edition de Charles-Louis Morand Métivier
- Transcription : Charles-Louis Morand Métivier
- Modernisation et Encodage : Nina Hugot
- Annotation : Nina Hugot et Charles-Louis Morand Métivier
- Relecture : Nina Hugot, Milène Mallevays, Julien Muller et Isabelle Pignone
La Tragédie du sac de Cabrières
Charles-Louis Morand-Métivier, Université du Vermont
La Tragédie du sac de Cabrières, tragédie anonyme écrite entre 1559 et 1574, se démarque des autres tragédies de la Renaissance ; en effet, elle n’est basée ni sur un événement ou des personnages bibliques, ni sur l’antiquité gréco-latine. Mais sur un événement historique, très proche de son écriture. En 1545, les troupes royales ont assisté celles du parlement de Provence pour éradiquer les populations vaudoises du Luberon ; au cours de ce massacre, les villages de Cabrières et de Mérindol ont tous deux été détruits, et leur population exterminée ou déportée. C’est ce douloureux événement, par ailleurs assez méconnu, qui est au coeur de cette pièce de théâtre.
Bien que cette pièce soit connue de la majorité des seiziémistes, ce n’est que récemment qu’elle a connu un regain d’intérêt académique. C’est en 1994 que Roger Klotz, avec “Lecture méthodique de la Tragédie du sac de Cabrières,” a écrit le premier article sur la tragédie. Avant cela, la seule analyse de ses thèmes se résumait à l’appareil critique des éditions de Joseph Vianney (1927), Karl Christ (1928), et Daniella Bocassini (1990). La même année que Klotz, Olivier Millet a écrit la première analyse de fond de l’oeuvre, avec « “Vérité et mensonge dans la Tragédie du sac de Cabrières : Une dramaturgie de la parole en action, » qui se concentre sur le rôle de la bonne et de la mauvaise parole dans la construction des personnages de la pièce. En 2006, Anne Baretaud avec “Le Récit comme acte dans les tragédies bibliques du XVIe siècle » a utilisé Cabrières comme un des points d’encrage d’une analyse de la parole dans diverses tragédies. Nina Hugot, avec son article « Le “spectacle étrange” de la mort des femmes dans La Tragédie du sac de Cabrières (Anonyme, 1566-1568) » et son livre « D’une voix et plaintive et hardie » La tragédie française et le féminin entre 1537 et 1583 s’intéresse au rôle des femmes dans notre tragédie. Finalement, Charles-Louis Morand-Métivier a consacré un chapitre de sa thèse doctorale « Apprendre des massacres : émotions et nations dans la littérature francaise » à la tragédie ; il est par ailleurs l’auteur d’un analyse des personnages masculins de la tragédie sous le prisme du genre, « La Construction de la masculinité dans la Tragédie du sac de Cabrières : Le cas d’Opède, », et de la première édition critique et traduction de la pièce en anglais, The Tragedy of the Sack of Cabrières. En octobre 2023, Nina Hugot a organisé la première journée d’étude dévouée entièrement à la pièce, sur le campus de l’Université de Lorraine à Metz. Ces présentations, qui mirent en avant divers aspects de l’oeuvre, furent accompagnées d’une mise en scène de plusieurs passages de la tragédie par la compagnie Oghma -ce qui représenta sans doute la première fois que la pièce fut jouée. Les actes de ce colloque vont être publiés par la revue Le Verger.
Cette tragédie n’a ni actes, ni scènes. Devant les remparts de Cabrières, ville vaudoise assiégée par les troupes royales et provençales, Catderousse et Poulin, deux chefs des armées assiégeantes, critiquent d’Opède, leur supérieur : leur assaut a été repoussé, et ils reprochent à leur chef son manque de prise de décision et sa pleutrerie. D’Opède explique qu’il doute parce qu’il voit en le peuple de Cabrières un peuple choisi par Dieu. Cependant, après de nombreuses réflexions, il décide de se ranger du côté de ses hommes et de tout faire afin de détruire la ville. Afin d’arriver à ses fins, D’Opède demande à Poulin de se rendre chez les Vaudois afin de leur annoncer - ce qui est un piège - que les armées veulent se ranger de leur côté contre d’Opède (1-244). Le choeur se réjouit de la victoire des élus, permise par Dieu (245-370). Poulin est reçu par les deux chefs de Cabrières, le Maire et le Syndique. Si Le Maire est très critique de Poulin, et semble voir en lui la ruine à venir de Cabrières, Le Syndique veut donner une chance à ce dernier (371-654). Le choeur chante les méfaits du faux-parler (655-814). Les Vaudois lisent à D’Opède, qui prétend vouloir faire la paix, leur profession de foi (815-1014). Le choeur chante les pouvoirs de la parole vraie (1015-1230). Poulin annonce à d’Opède qu’il ne veut plus participer à la destruction de Cabrières ; D’Opède lui demande alors de retourner auprès des Vaudois pour obtenir leur profession de foi. Alors que le Maire et le Syndique continuent de déclamer les actes de leur profession de foi, les troupes de Catderousse et d’Opède pénètrent dans la ville, et commencent à massacrer toute la population, ce que les Vaudois découvrent avec horreur (1231-1412). Le choeur se lamente et condamne la cruauté de d’Oppède (1413-1532). Poulin, écoeuré d’avoir été à son corps défendant responsable de ce massacre, fait le terrible récit du massacre aux assiégés (1533-1726). Arrive Catderousse, qui persiste dans sa cruauté et mène le reste de la population au supplice : la cruauté de d’Oppède s’oppose au courage des Vaudois, et le Choeur prie alors que leur mort permette la création de nombreuses autres églises et communauté vaudoises (1533-1780).
La pièce met l’accent sur l’importance de la parole. C’est celle-ci, en effet, qui fait et défait les différents groupes qui la composent. La parole est centrale aux nombreuses interventions du Choeur, être omniscient qui glosent justement les utilisations qui sont faites des mots, soit dans un but positif -la protection et la glorification de la ville de Cabrières- soit dans un but négatif – celui de la destruction de la ville et de ses habitants. La parole illustre également un des autres thèmes de la pièce, à savoir celui de la religion. D’Opède, Poulin et Catderousse ne montrent que très peu d’intérêt pour la religion, en ne citant Dieu que très rarement, et sont très clairement représentés comme des monstres dont le seul objectif est d’éliminer les « vrais chrétiens » que sont les habitants de Cabrières. Ainsi, quand ils demandent au Syndic et au Maire de présenter la profession de foi de leur peuple, ce n’est qu’afin de les tromper et de préparer leur entrée dans la ville. On assiste ainsi à une opposition entre le prétexte religieux, utilisé par les troupes royales, et une population vaudoise qui vit sa vie entièrement dans le contexte religieux.
--- 1r ---
Pour très- illustre PRINCE Monsieur Christophle Duc de Bavières, filzfils très- aimé De Mon Seigneur l’Electeur, et Comte PALATIN et ca.
--- 1v ---
TRAGEDIE DU SAC DE CABRIERE
D’Opede
Un coeur vaillant mourra plustostplutôt qu’estreêtre vaincu
Et moymoi las malheureux auray aurais-je tant vescuvécu
Qu’à vaincre ou à mourir je preferepréfère la fuite !
Poulin
Le Lion fuit s’il a un Cerf pour sa conduite
5Ainsi le camp auquel commande un bonnet rond 1
Comme Neige au Soleil devant l’ennemi fond.
Catderousse
Vous vous entendez 2 trop aux procesprocès et enquestesenquêtes
À faire fouetter à faire couper testestêtes
Ou à faire souffrir quelque plus dure mort.
Poulin
10Encor 3 scavez savez-vous bien du droit faire le tort
Mais comme il faut donner chaudement les alarmes
Vous vous y entendez comm’commeun clerc fait aux armes.
Catderousse
Si nous eussions suivysuivi et redoublé l’assaut
N’eussions eussions-nous pas franchi le remparrempart de plainplein saut
15N’eussions eussions-nous pas desjadéjà l’enseigne sur la breschebrèche
Poulin
Nos ennemysennemis voyansvoyant que rien ne les empescheempêche
Ont seurementsûrement leur lieu Imprenable rendu
Et nous l’avons couards trop lachementlâchement perdu
--- 2r ---
Catderousse
Quiconque se veoitvoit chef d’une puissante armée
20S’il a profond au coeur la vertu imprimée
Jamais fortifier ne laisse l’Ennemi
Poulin
Si du tout il ne peut il le rompt à demi
TantostTantôt par fausse alarme et tantosttantôt de grand 4 force
L’assaut à l’improviste et rudement le force
Catderousse
25Le Coeur glacé de peur ne sait jamais pouvoir
Poulin
Ô le grand bien que c’est que de rien ne savoir
L’homme le plus rusé en procesprocès et querelequerelle
En la guerre n’eut onc 5 une once de cervelle
D’Opède
Bien qu’homme je ne soyesois à nul de vous pareil
30En force et hardiesse, aussi peu qu’en conseil
Les Conseils de la main en moymoi pourtant se treuventtrouvent
Tels que quelques amysamis quelquesfoisquelquefois les appreuventapprouvent.
Catderousse
Qui vous empescheempêche donc ayant si bons souldarssoudards 6
D’encor les hazarderhasarder au dernier sort de Mars ?
D’Opède
35Un songe nuit et jour dormant veillant me bride
Par l’exemple fameux de la chaine d’Alcide 7
DelaquelleDe laquelle il tira vers luylui prompts les GauloysGaulois
Par l’oreille enyvrezennivrés du doux miel de sa voix
Tout ainsi cestecette ville à ma langue attachée
40Me semble tomber bas d’elle mesme-même arrachée
--- 2v ---
Mon DEVIN sur cela enquis m’a respondurépondu
De les vouloir forcer ce n’est que temps perdu
La lance n’y peut rien mais seulement la langue. 8
Poulin
J’ayai fait devant le Turc mainte fausse harangue 9
45Et si l’ayai maintesfoismaintes fois par mon faulxfaux doux parler
Contraint de cinq censcent naux 10 faire sur mer voler
Ses Bacchats 11 s’efforceoientefforçaient de tout m’y contredire
Je l’emportoyemportais pourtant bravement par mon dire.
Catderousse
» 12 Mais qui a un bon coeur et les armes au poinpoing
50» Du babil de la langue il n’a aucun besoin
D’Opede
» La langue (croyez) prend et ravit plus de ville
» Que la pique ou canon neni tous efforts hostiles.
Catderousse
» Une bonne entreprise on ne doit retarder
D’opede
Bien mais apresaprès faudra la langue hazarderhasarder
55De moymoi en attendant l’incertain de fortune
Je me retire à part sans compaigniecompagnie aucune
Poulin
Quel chef ! que gouverneur ! quel hardi combattant
Qui jusqu’à veoirvoir ses gens en bataille n’attend
Mais sur tous les poltrons 13 le poltron est si lache
60Qu’en lieu des premiers estreêtre il s’enfuit et se cache 14
Catderousse
Pensez qu’ainsi faisoitfaisait le superbe vainqueur 15
Duquel un monde seul ne contentoitcontentait le coeur.
Poulin
Allons poulserpousser nos gens que ces forts on canonne.
--- 3r ---
Catderousse
Que le dernier assaut de toutes parsparts on donne
Poulin
65Ou vivons y-y vainqueurs ou mourons y-y vaincuzvaincus
Catderousse
Si nous n’y entrons vifs mourons sous nos escusécus. 16
LE CHOEUR
Du sac de MerindolMérindol 17 cruellement funeste
Troupe captive au Camp de ces brigansbrigands je reste. 18
Les autres sont heureux qui errent par les champs
70Encor plus heureux sont ceux à qui ces meschansméchants
Ont esteintéteint les tormenstourments en esteignantéteignant la vie
La nostrenôtre à petit feu nous doit estreêtre ravie
Si faut il-il constamentconstamment tenir pour resolurésolu
Que c’est pour nostrenotre bien puis quepuisque DIEU l’a voulu.
75CabriereCabrières 19 cependant redouble son courage
Et d’Opede affoibliaffaibli de plus en plus enrage
PourceParce que contre Dieu n’y a force neni conseil
» Qu’il ne desrompedérompe ainsi que les nerfs d’un sommeil
Comme ces assiegezassiégés travaillent tous ensemble !
80Ce gros amas de peuple aux abeilles ressemble
Lesquelles pour se faire à part nouveau canton 20
S’entresuivent au son d’un clairsonnant laittonlaiton.
Ou quand pour reparerréparer leur utile dommage
ApresAprès qu’on a brisé l’orgueil de leur ouvrage
85Toutes devant les yeux de leur RoyRoi honnoréhonoré
Chambrittent 21 au compas leur palais tout doré
Un regimentrégiment des champs les richesses apporte
Qu’une autre troupe prend et deschargedécharge à la porte.
--- 3v ---
Maint scadron 22 au dedans les porte sur son flanc
90Dont les autres refont leurs salessalles rancrang à rancrang
Et ne cesse jamais cestecette race aeréeaérée
Tant que leur grand maison soit du tout reparéeréparée
Ceux de la ville ainsi travaillent aux remparsremparts
La terre sous leurs piezpieds fume de toutes parsparts
95L’un porte des fagots et l’autre force laine
L’autre tant de gazons qu’il en est hors d’alainehaleine
Force pierres ceux cy-ci ceux là-là force fumier
Cestui cyCelui-ci des grands bois marchant tout le premier
Et ceux là-là plus hastezhâtés y jettent leurs lits mesmesmêmes
100Mais cestui làcelui-là y fourre (ô mon Dieu) les corps blesmesblêmes
De leurs souldarssoudards occis 23 pour encor s’en servir
Voyez descendre l’un voyez l’autre gravir
À grands coups de mouton 24 les autres tant terrassent
Que leurs remparsremparts levés toute breschebrèche surpassent.
105Voyez vous l’ennemy contre le mur courir
Ô Dieu qui es leur fort vueillesVeuille 25 les secourir 26
Dieu par qui à ton peuple estoientétaient defensesdéfenses faites
De combattre devant que 27 sonner les trompettes.
Nous enseignant par là pour ne combattre en vain
110Qu’il faut que nous prenions les armes de ta main
Arme donques les tiens d’une hardiesse sainte
Et saisisaisis ces meschansméchants d’une mortelle crainte
Qu’ils ne soyentsoient jamais veusvus de ce lieu triomphanstriomphants
Pour avoir massacré ô PerePère tes enfansenfants 28
D’opede 29
115Est il-il donc arrestéarrêté qu’une heure en patience
Vivre ne me lairras 30 maudite conscience
PourquoyPourquoi veux je-je ce peuple estreêtre tout massacré
--- 4r ---
Ce peuple tout fidelefidèle et à Dieu consacré !
Ce peuple dont la vie est si saintement pure
120Que pour l’amour de luylui Dieu encor nous endure
France seroitserait en proyeproie et les FrançoisFrançais captifs
Ou serviroientserviraient au Turc ou esclaves craintifs
SeroientSeraient ja 31 transporteztransportés au profond des Hespaignes 32
Sans le voeu d’oraison que fait en ces montaignesmontagnes
125Ce saint tropeautroupeau tousjourstoujours pour le RoyRoi exaucé
Que fera donc ce camp qu’ici je tiens dressé ?
Le ciel leur favorise et m’est de tout contraire
Dieu prend leur cause en main et je les veux defairedéfaire
Si faut il-il passer outre ou mourir où je suis
130DesisterDésister je ne veux et aussi je ne puis
» Car l’homme qui du tout acheveachève un meschantméchant acte
» N’apparoitapparaît si meschantméchant qu’un sot qui s’en retracterétracte
» Cestui cyCelui-ci luy mesmelui-même est le Juge de son fait
» PourcePour ce 33 le condamnant qu’il le laisse imparfait
135» Mais l’autre qui poursuytpoursuit jusqu’à la fin son oeuvre
» Semble estreêtre vertueux quand tout son mal il coeuvre 34
» D’une perseverancepersévérance entiereentière sous espoir
» D’une agreableagréable issue à ses desirs avoir
Ô que si jamais donc je romps mon entreprise
140La roüe d’Ixion pour Ixion me brise 35
Que me serviroit servirait-il qu’au lieu d’un bonnet rond
De cestcet armet doré je me couvre le front ?
Au lieu de ma grand robberobe avoir cestecette cuirasse ?
Pour la plume en la main cestecette pesante masse ?
145Suis je-je quictantquittant ma mule armé sur ce roussin 36
Pour m’enfuir en lieu d’attendre et veoirvoir la fin
Ay Ai-je bruslébrûlé Pepin la Motte Saint Estienne
--- 4v ---
Lormarin, Valelaure et la Roche prochaine
Foudroyé Cabrieretteabysméabîmé MerindolMérindol
150Saccagé Saint Martin 37 ay ai-je ravi d’un vol
Vingt bourgs villes chasteauxchâteaux les ayai mis en braise
Comme n’ayansayant servi jamais que de fournaise
Ay Ai-je donques 38 destruitdétruit tant d’hommes et de lieux
Pour estreêtre pitoyable en lieu de furieux
155Afin qu’en espargnantépargnant ce reste de Canailles
Je leur quictequitte le fruit de toutes mes batailles
Seroit Serait-ce bien à fin que ce que j’ayai gaignégagné
Soit à mon ennemyennemi pour l’avoir espargnéépargné !
Et qu’on distdit de D’Opede il obtient bien victoire
160Mais il n’en scaitsait user à son profit neni gloire
Je les ayai condamnezcondamnés à perdre biens et corps
Qu’ils ne vivent donc plus ils m’enrichissent morts
Sus sus sus que pour moymoi leur arrestarrêt j’exequuteexécute
CesteCette grand’Courtisane 39 à qui mon bien j’impute
165Ayant de don du RoyRoi leur confiscation
M’a fait pour petit pris de son droit cession
Avec tout plainplein pouvoir de lever des gendarmes
Gens de pied et souldarssoudards bien exercezexercés aux armes
Enseignes desployerdéployer estendarsétendards, gomphanonsgonfanons
170Mener artillerie et braquer gros Canons
Voilà comme je suis generalgénéral capitaine
De tout ce camp lequel où il me plaitplaît je meine
Tous mourront du premier jusques au dernier rancrang
Ou je mettraymettrai Cabriere 40 au jour d’huyaujourd’hui toute en sang.
LE CHOEUR
175L’eterneléternel a ouyouï nostrenotre ardanteardente priereprière
Faisant que ces vilains ont tourné le derrière 41
--- 5r ---
Catderousse
Nos ennemysennemis nous ont si vaillansvaillants repoussezrepoussés
Qu’ils ont de nos gens morts remplis tous leurs fossés
Poulin à cest’cette heure est pour vous tenir promesse
180Avecques 42 un herauthéraut presprès de leur forteresse
Nous voicyvoici vostrevotre gendre et saint Romain aussi 43
Et autres principaux qui retournons icyici
Nous avons d’un accord par Poulin fait la trevetrêve
Attendant que couvert son oeuvre il paracheveparachève
185Il a ja 44 fait sortir les gouverneurs vers luylui
Croyez qu’il les rendra captifs dans ce jour d’huyjourd’hui.
D’Opede
Si Poulin envers moymoi ne se monstremontre fidelefidèle
La peine de la mort ne m’est assésassez cruelle
Ô jour trop malheureux ! quelles gens se sont mis
190Pour renfort dans la ville avec nos ennemis
Catderousse
Autres qu’eux n’ont defautdéfaut tant de nos vaillansvaillants hommes
D’opede
Contr’Contreun d’eux neantmoinsnéanmoins vingt ou trente nous sommes.
Catderousse
Le plus foiblefaible souvent surmonte le plus fort
D’opede
Ainsi ballotte Mars le hazardhasard de son sort
Catderousse
195ToutesfoisToutefois comme ayant en ma main la victoire
J’enflamboyenflambai nos souldarssoudards ainsi du feu de gloire
SouldarsSoudards si vous avez tels coeurs qu’aviez devant 45
Ils sont vaincus c’est fait piquez donques avant
Le premier qui mettra les piezpieds sur la muraille
200Aura outre l’honneur cestecette riche medaillemédaille
Et le second aura ma chainechaîne de pur or
--- 5v ---
Le troisiesmetroisième un beau prisprix et le quatriesmequatrième encor
HarquebusiersArquebusiers tirez -vous trainanstraînant sur le ventre
Poulin, crioitcriait aussi : si le soleil y entre
205N’y entrerons -nous pas ? Courage là dedans
Les poltrons prient Dieu comme ja se rendansrendant
Je crie au canonnier qu’il redouble la breschebrèche
Qu’est du jour d’hyerhier encore toute freschefraîche
À grands coups de canon qu’il batte leurs remparsremparts
210Et ceux qui sont dessus fonce de toutes parsparts
Mais un plus asseuréassuré nostrenotre Canonnier perseperce
Par le milieu du corps et tout mort le renverse
De tout nostrenotre ScadronEscadron qui se serroitserrait de presprès
Les plus forts sont blessés et repoulsezrepoussés apresaprès
215Si dru ne chet 46 la greslegrêle au giron de la Terre
Comme tombent espés nous 47 vaillansvaillants gens de guerre
Panisse 48 alors crioitcriait : comment vous reculez
Et si en avez tant massacrés et bruslésbrûlés
Bon coeur souldartsoudard bon coeur sus entre monte tue
220Cependant qu’un chascunchacun combattant s’esvertueévertue
Ce Canonnier nous bat sans cesse et si adroit
Qu’il ne pourroitpourrait faillir quand faillir il voudroitvoudrait
Tout ce qu’on a escritécrit des cent mains de Briaire 49
Et cent bouches à feu est chose trop vulgaire
225Au prisprix de cestui cycelui-ci qui tirant bas et haut
Ne cesse de tuer tant que dure l’assaut
Pour les cent mains de l’autre et cent bouches ou forges
CestuiCelui a mille bras et mille ardentes gorges
Dont il vomit le feu si espésépais foudroyansfoudroyant
230Qu’en routteroute 50 et fuite il met le reste de nos gens
Mais quoyquoi pour eviteréviter une entiereentière defaitedéfaite
Ils n’ont point attendu qu’on sonnastsonnât la retraite
--- 6r ---
D’opede
» L’experience auzaux folsfous mais c’est trop tard apprend
» Qu’avant le coup le sage escouteécoute et conseil prend
235» Qui peut estreêtre vainqueur sans hazarderhasarder sa vie
» S’il la hazardehasarder il n’a de la garder envie
Mais puis quepuisque Poulin est allé parlementer
À eux devant le temps ne le faut tourmenter
Durant la trevetrêve allons au tour de la muraille
240PrenansPrenant garde que nul de ces meschantsméchants n’en saille 51 .
Car j’ayai juré que vif nul n’en eschapperaéchappera
Hommes femmes enfansenfants tout meurtrymeurtri y sera
Catderousse
Adieu donc car Poulin aux vilains fait entendre
Que Je veux contre vous pour eux les armes prendre 52
Le Choeur
245La victoire
Ne vient pas
NeNi la gloire ! par le pas
Ni compas
Du mortel
250L’immortel 53
Qui l’ordonne
Seul la donne
De nature l’escorceécorce est
Bien peu dure
--- 6v ---
255La forestforêt
Pourtant naistnaît
S’espessitépaissit
Se grossit
Et renforce
260Sous l’escorceécorce
L’arbre elle arme
Contre l’air
Et l’alarme 54
Rouge et clair
265De l’esclairéclair
Pour le fruit
Qu’il produit
De fleurs belles
Annuelles.
270De l’escailleécaille
L’ast 55 de mer
Fait sa maille
Pour s’armer
Et de l’äerair
275Les legiers 56
Chevaliers 57
Font rondelesrondelles
De leurs ailes.
--- 7r ---
La LimasseLimace
280Dans son fort
Se ramasse
Et n’en sort
Ains 58 tient fort
D’ongles grands
285Corne et densdents
Mainte bestebête
Se font testetête.
ChasqueChaque sorte 59
En ses droits
290Se tient forte
Mais des Rois
Nul harnois 60
Tant soit fort
Que la mort
295Ne les darde
Ne les garde 61
Quelque ruse
Ou scavoirsavoir
Dont l’homme use
300Quelque avoir
Ou pouvoir
Qu’il fait sien.
Ce n’est rien
Quand Dieu contre
305Fait sa monstremontre 62 .
--- 7v ---
Rien le nombre
Des souldarssoudards
De l’encombre et hazardshasards
Du dur Mars
310Quand Dieu veut
Rien ne peut
Tout en somme
Sauver l’homme
Ains 63 la dextre 64
315Du seul Dieu
Et seul maistremaître
En tout lieu
Au milieu
Du combat
320Seule abbatabat
Mort sur l’herbe
Le superbe.
Elle seule
À la mer
325Fait la geulegueule
Defermer 65
Puis ramer
À beau pied
Dans le gué
330Son armée
Pourchassée
--- 8r ---
Or l’Egypte
Pour cela
Plus s’irrite
335Dont par là
DevallaDévala
Au tombeau
Dessous l’eau
Qui l’engorge
340Dans sa gorge 66
La gent sainte
Puis 67 eut peur
D’un camp ceinte
Quand l’horreur
345Du GeantGéant
MaugreantMaugréant
La defiedéfie
De sa vie
Elle pleure
350Et David
Tout sur l’heure
Elle veitvit
Qui seul feitfit
Ce rocher
355 TrebuscherTrébucher
Bas à terre d’une pierre 68
--- 8v ---
Qui s’appuyeappuie
Au Seigneur
Et s’y fie
360Aura l’heur 69
Et l’honeurhonneur
Et le prisprix
D’avoir pris
Ses contraires
365Adversaires 70
Poulin
Ces captifs m’ont suivysuivi. Ils consultent ensemble
J’ayai peupu d’icyici ouyrouïr leurs propos dont je tremble 72
Le Maire
CeluyCelui qui parlemente à l’ennemyennemi se vend
Le choeur
L’asiégéassiégé par l’oreille en la prestantprêtant se prend
Le maire
370Ce n’est pas en la guerre où derechef on pechepèche
La premierepremière faute est une mortelle breschebrêche
Le choeur
La la premierepremière faute est d’un encombre tel
Qu’amender ne se peut par l’esprit du mortel.
Le maire
Quelle rage vous a privezprivés d’intelligence !
--- 9r ---
375Quelle fureur vous osteôte insensés cognoissanceconnaissance !
Qui vous a hors du sens si brutalement mis
Que de capituler avec nos ennemis !
Le Choeur
Si Cabriere 73 en avoitavait encore dix semblables
Ses murailles seroientseraient pour jamais imprenables
380L’appasappât et trahison de l’endormant flateurflatteur
Sans leur nuire cherroitchoirait 74 sur le chef 75 de l’autheurauteur
Le maire
Estimeriez -vous bien que vers vous Poulin sorte
De ce gouffre d’Opede et qu’il vous en apporte
Mot qui ne soit le fiel de douloureuse mort
Poulin
385C’est fait de moymoi c’est fait je suis pris je suis mort.
Le maire
N’apercevez -vous point le venin de d’opede !
Ou bien l’appercevantapercevant n’y mettez -vous remede
Helas cognoissez connaissez-vous si peu ce faux Poulin
Ce faux Poulin remplyrempli du faux esprit malin
390Ce faux Poulin duquel les Turcs sont les nourrices 76
Ce faux Poulin qui fait de toutes vertus vices
Ce faux Poulin qui croit en Dieu comm’comme un cheval
Le meschantméchant (croyez -moy) nostrenotre ruyneruine forge
Venant pour nous couper de nos cousteauxcouteaux la gorge
Le Syndique
395» Quand d’espererespérer la paix quelqu’quelque heureux signe luit
» SeditionSédition n’a lieu qu’entre les furieux 77
--- 9v ---
Pourtant doit l’eviteréviter quiconque sa charrue
Veut veoirvoir de halecrets en coutres revestuerevêtue 78
Maire retirez -vous pour n’empescherempêcher tel heur 79
Le maire
400C’est bien dit, car la mort aux ChrestiensChrétiens n’est malheur
Le choeur
Le feu celestecéleste rapt qu’on feint de PromethéeProméthée
Est le don de prudence heureusement entée.
Au cerveau de ce Maire : ô que s’il estoitétait creu 80
Jamais Ils ne seroientseraient consumés par le feu.
Le maire
405Adieu et vous gardez de vous livrer en proyeproie
Pour dire mais trop tard helashélas je n’y pensoye 81 82
Le Syndique
» Il faut par tous moyens plustostplutôt que par effort
» Faire que l’ennemyennemi cognoisseconnaisse qu’il a tort
AppellezAppelez donc Poulin. CaÇà 83 venez capitaine
410Dites -nous s’il vous plaistplaît la cause qui vous meinemène 84
Poulin
La cause vrais ChrestiensChrétiens vostrevotre bien seulement
Et à fin qu’asseurezassurés n’en doubtiezdoutiez nullement
PremierementPremièrement le Dieu que vous priez j’invoque
Qu’il vueilleveuille presiderprésider sur ce presentprésent colloque
415Qu’il n’y soit dit neni fait rien contre son honneur
Rien contre vous enfansenfants du ToutpuissantTout-puissant Seigneur
Ce fondement bien mis au nom de vostrevotre PerePère
Tel que vous me voyez tenez -moy vostrevotre frerefrère
D’autant que du profond gouffre d’iniquité
--- 10r ---
420Mon Dieu m’a fait surgir au port de vérité
Pour le glorifier je n’ayai honte de dire
MeschantMéchant ! que j’ayai osé de ma mère mesdiremédire
Comme d’une putain pour estreêtre par tel art
Du seigneur de Grignan reputéréputé le bastardbâtard 85
425 Plus tostPlutôt que d’estreêtre au vrayvrai dit le fils legitimelégitime
De mon perepère un pouvrepauvre hostehôte homme de nulle estime
VrayVrai est qu’entre les Turcs j’ayai aprisappris à mentir
Mais pleurant je ne fayfais las que m’en repentir
Christ ne m’a pas instruit en sa vérité sainte
430Qu’il ne m’ait fait hayrhaïr toute parolleparole feinte
Bien que tousjourstoujours Poulin bastardbâtard on jurera
Poulin pourtant menteur trouvé plus ne sera
VostreVotre tant bon seigneur est poulsépoussé d’un tel zelezèle
Qu’il m’a rendu en Christ la gracegrâce à Dieu fidelefidèle
435Ce qu’estreêtre je ne puis sans vous delivrerdélivrer tous
Ou bien que je ne meure aujourd’huyhui avec vous
Le Syndique
Le Sieur de Catderousse et sieur de cestecette ville
Pourrroit Pourrait-il bien entendre et aimer l’Evangile
Poulin
Pour vous en asseurerassurer d’un grand coeur il m’a dit
440Que plustostplutôt que souffrir à cestcet homme maudit
Toucher du bout du doigt une seule personne
À mille morts pour vous sa vie il abandonne
De moymoi voicyvoici le point sachez que quand Je voyvois
Si constante envers Dieu et envers vous sa foyfoi
--- 10v ---
445Je luylui baise la main et hautement m’escrieécrie
Mourons pour eux ou bien sauvons -les je vous prie
Il respondrépond qu’il est prestprêt demande seulement
Que je luylui vueilleveuille ouvrir le moyen et comment
Il faut que nous allons 86 (luylui di dis-je) expresexprès defendredéfendre
450À ce sot presidentprésident de rien plus entreprendre
Sur nul de vos subjectssujets neni sur leur bien aussi
Que dans demain il vuidevide et tout ce camp d’icyici
Autrement il scaurasaura qu’un Gentilhomme en guerre
Des mains d’un AdvocatAvocat scaitsait bien garder sa terre
455Quant est du differentdifférent pour vostrevotre foyfoi esmeuému
Qu’il en soit par le RoyRoi chrestiennementchrétiennement cogneuconnu
Le tout ainsi conclu nous allons à D’Opede
LuyLui d’un front refrongnérenfrogné d’une grimace laide
Et d’un regard hideux nous cuide espouventerépouvanter 87
460Vous l’eussiez veuvu crier se battre et tourmenter
Et qui pis est vomir blasphemesblasphèmes execrablesexécrables
Mais nonobstant ses cris si fermes et si stables
Persister il nous veoitvoit ou qu’il luylui faut mourir
Ou à son barreau d’Aix vistementvitement recourir
465Car j’avoyavais pratiqué souldarssoudards 88 et capitaines
Qui contre luylui jestoientjetaient la rage de leurs haines
Criant que ce larron ce vieil asneâne cassé
Tout à cest’cette heure soit par les piques passé
Luylui (comme de deux maux on doit prendre le moindre)
470À l’accord de vuidervider 89 contraint est venu joindre
« Car l’homme qui ne peut faire ainsi comm’commeIl veut
« Contraint est de vouloir seulement ce qu’il peut
--- 11r ---
Le Syndique
Quel accord s’il vous plaistplaît dites -le en sa substance 90
Poulin
C’est que pour sa deschargedécharge et pour son asseuranceassurance
475Sans laisser un seul point vous mettrez par escritécrit
La foyfoi que vous avez au PerePère en JesuchristJésus-Christ
Au saint Esprit aussi ; qu’à d’Opede à cestecette heure
Le tout clos soit porté à fin qu’il ne demeure
Pour quatre mille escusécus 91 c’est sa dernieredernière main
480VostreVotre seigneur pour vous s’est monstrémontré si humain
Qu’il a promis payer la somme toute entiereentière
Regardez regardez fidelesfidèles de Cabriere
Comme le Dieu vivant vostrevotre unique secours
Vous retire au jourd’huyaujourd’hui des pattes de cestcet ours
485À fin qu’ici tousjourstoujours vous chantiez les louanges
De Dieu qui seul a fait merveilles si estrangesétranges
En delivrantdélivrant les siens qu’il rend leurs ennemysennemis
Par son esprit changezchangés en leurs plus grands amis
Ainsi changé par luy autheurauteur de ma venue
490Je ne cerchecherche sinon que ma foyfoi soit cognueconnue
Entre vous par les fruits de Sainte Charité
TesmoignageTémoignage certain de ma fidelitéfidélité
Maintenant c’est à vous de veoirvoir sur cestcette affaire
Et si je puis encor 92 quelqu’autre chose faire
495Vous ne m’espargnerezépargnerez, l’effet vous fera veoirvoir,
Que j’aurayaurai comm’comme amyami fait du tout 93 mon devoir
Pour la fin Je vous pri 94 de faire en telle sorte
Que ce vilain s’en aille tenir ailleurs escorte
Le Syndique
--- 11v ---
Si là avec le Maire il vous plaistplaît deviser
500Nous pourrons entre nous plus libres adviseraviser
Ou si nous vous devons à poursuyvrepoursuivre semondre 95
Et vous remercier ou autrement respondrerépondre
Poulin
Je m’en vayvais avec luylui faites tout à loysirloisir
Et vous gardez du mal en lieu du bien choisir 96
Le Maire
505Voici venir Poulin Poulin nostrenotre ruine
Poulin
Contre ce fin rusé faut que je contremine 97
Le maire
Mon Dieu tu me retiens qu’à ce traistretraître menteur
Je ne donne du plomb droitement dans le coeur
Ô maudite harquebusearquebuse ô maudites plombées
510Tant de personnes sont mortes par vous tombées.
Hélas ! estoit était-ce à finafin maintenant d’espargnerépargner
Ce meschantméchant pour le faire en nostrenotre sang baigner
Ah ! que n’est -il permis de bien faire en tuant
Et le sang estancherétancher du sang d’un sanguinaire
515Que tu n’y serves rien malheureux pistolet !
Rien malheureux Canon ! rien malheureux boulet !
Ô malheureux salpestresalpêtre 98 , ô malheureuse poudre
Puis quePuisque ce traistretraître à Dieu vous ne bruslezbrûlez en foudre
Poulin 99
Garde qu’à cestui celui-ci tu ne sois descouvertdécouvert
520Poulin ou tu seras percé à jour ouvert
--- 12r ---
Mon frère voyez -vous ces sept qui se pourmeinentpromènent
Et couplezcouplés deux à deux grand suite apresaprès eux meinentmènent
Le Maire
Si je les voyvois ? Oui il y a jajà long tempslongtemps
Poulin
Ô qu’ils sont de me veoirvoir en ce lieu malcontensmal contents !
525Car ils n’ignorent pas qu’à chacun je racompteraconte
Leurs vies 100 qui feroyentferaient SathanSatan rougir de honte 101
Ce monstre qui la rage escumeécume furieux
Ce premier di dis-je à qui le feu sort par les yeux
Ce visage emprunté cestecette teste pointue
530Ce gros groin de pourceau cestcet aller de tortue
Ces grands oreilles d’asneâne et ces grands densdents de loup
Ce col à vis froncé dans le corps tout à coup
Ces levreslèvres contre Dieu à blasphémer hardies
Ces doigts crochezcrochés ainçois 102 ces gryphesgriffes de HarpyesHarpies
535Qui contaminent tout ce qui en est touché
Ces aixellesaisselles fyfi fyfi où le bouc est caché
Ce grand gouffre de ventre estayéétayé sur deux piles
LegièresLégères à destruiredétruire autrement immobiles
Dont le fondement est de deux pieds de gryphongriffon
540CesteCette bestebête puante et de faictfait et de nom
Puante si puant avant qu’elle soit morte
Que d’un mill’la sentant la femme grosse avorte
C’est d’Opede Minier 103 ah le ladre pourri
Par les TygresTigres petit fut de leur sang nourrynourri
545Depuis ses premiers ans ces premiers mets de Thrace
Jusqu’à crever l’on fait ainsi sanglante masse
D’un corps si bien marqué jugez quel est l’esprit
Qui fors que cruauté rien 104 en son temps n’apprit
--- 12v ---
Tel le corps tel l’esprit homme ne scauroitsaurait dire
550Lequel des deux le plus son compaignoncompagnon empire
Ce monstre si hideux ores 105 dans son chasteauchâteau
Bat la fausse monnoyemonnaie or’y tient le bourdeau 106
Ouvert à tous venansvenants là cestcet inceste infameinfâme
Fait de sa propre seursoeur sa legitimelégitime femme
555Et pour mieux se monstrermontrer le meschantméchant des meschansméchants
Il a fait là le sang regorger par les champs
Le maire
Mais qui est cestuy celui-là qui l’accoste et le touche
Et comm’commeun gros matinmâtin 107 tourne vire et se couche ?
Poulin
C’est son vilain de gendre en toute cruauté
560Pire que son beau perepère et en desloyautédéloyauté
Pour scavoirsavoir ses vertus contentez -vous en somme
Que jamais le Soleil ne veidvit si meschantméchant homme
Le maire
Ces deux qu’on voit apresaprès si braves se marcher ?
Poulin
Ô qu’ils voudroyentvoudraient vous veoirvoir tous en piecespièces hascherhâcher !
565Le plus petit des deux a fait mourir son frerefrère
L’autre a rendu la mort pour sa vie à sa meremère
Le maire
Et cestcet autre fuyant sçavez savez-vous qui il est ?
Poulin
Je ne le scaysais que trop dont fort il m’en desplaistdéplaît
Il n’est SathanSatan nyni homme ains 108 pire que le diable
570Car la divinité il distdit n’estreêtre que fable
Des autres le premier n’a point aussi de Dieu
Non plus que le second qui se marche au milieu
Le maire
Le tiers 109 tant basanné 110 monstremontre bien à sa mine
--- 13r ---
Que pour estreêtre bourreau homme n’y a plus digne
Poulin
575Croyez qu’on ne pourroitpourrait jamais depeindredépeindre au vif
Les vices malheureux de ce malheureux Juif
Le maire
Monsieur de Catderousse ou est -il à cestcette heure ?
Poulin
S’il est veuvu avec eux prenez moy-moi que je meure
Car il les a en haine et tant que soufflera
580Du Pole Articq’ 111 la bise il ne les aimera
Le maire
Allons on nous rappelle ô combien je voudroye 112
Que ce cheval ne feistfît de Cabriere une Troye 113
Le Syndique
Nous remercions Dieu de ce qu’il a usé
De sa gracegrâce envers vous paravant 114 abusé
585Aux erreurs de SathanSatan en vous monstrantmontrant sa voyevoie
VoyeVoie 115 que qui la suit garde n’a qu’il fourvoyefourvoie 116
GracesGrâces nous luy rendons de vostrevotre volonté
Pour nous heureusement remettre en liberté
AumoinsAu moins s’il est ainsi que vous venez de dire.
Poulin
590Ah faites moy-moi mourir c’est ce que je desiredésire
Je suis las de tant vivre ô mort mon seul repos
Puis quePuisque ces gens de bien doubtentdoutent de mes propos
Le Syndique
La plus partplupart les croit bien mais jamais n’est si ferme
Ce qu’on dit simplement comme ce qu’on afferme 117
Poulin
--- 13v ---
595Ô souverain seigneur qui tient tout sous ta main
Seigneur qui nous defensdéfend de ton nom prendre en vain
Et qui as condamné avecques 118 le perjureparjure
CeluyCelui qui en mesprismépris pour neantnéant ton nom jure
Ô Seigneur qui destruisdétruit les traistrestraîtres et menteurs
600Et vois le plus profond de l’abysmeabîme des coeurs
Je te prie Eternel que sur moymoi tu desserres
Tes foudres tes esclairséclairs, tes esclattanséclatants tonnerres
Qu’à présent J’en soy’soisars 119 de tout salut forclos 120
Si pour ce peuple saint que ce camp tient enclos
605Je n’ayai pris le combat et trouvé la manieremanière
Pour sauver aujourd’huyaujourd’hui et delivrerdélivrer Cabriere
Que je soyesois ô mon Dieu comme CainCaïn maudit 121
S’il n’est ainsi du tout comme je leur ayai dit
Et qu’éternellement de ton fils le meritemérite
610En lieu de t’appaiserapaiser plus contre moymoi s’irrite
Le Ciel me soit fermé la fureur de la mer
Me vienne au plus hideux des gouffres abismerabîmer
L’air pour m’entretenir de tous venins m’emplisse
La terre ne me porte encor moins me nourrisse
615Si du tout je n’ayai dit la pure vérité
N’ayesaie jamais Seigneur de ce Poulin pitié
Le Syndique
À cestcette heure on vous croit toutesfoistoutefois je puis dire
Que mieux on vous eusteût creucru sans ainsi vous maudire
Poulin
Pour affermeraffirmer le vrayvrai est -ce fait meschammentméchamment
620D’en faire juge Dieu qui seul scaitsait si on ment ?
Le maire
Je crains que vrayvrai ne soit en ce vilain qui jure
--- 14r ---
Que plus jure vilain plus vilain se parjure
Le Syndique
Nous accordons le tout voicyvoici de nostrenotre part
Les points de nostrenotre foyfoi icyici escritsécrits à part
625Scellez et cachetez nostrenotre foyfoi sera veuevue
Par là telle qu’elle est tousjourstoujours par nous tenue
Le Maire et moymoi l’irons au nom de tous porter
Et à qui vous voudrez hardiment presenterprésenter
Le Maire
À la charge Messieurs qu’y laisserons la vie
630C’est honneur que pour Christ elle nous soit ravie
Poulin
Dieu vous facefasse en sa foyfoi heureux vivre et mourir
Au reste il faut encor 122 pour mieux vous secourir
Que Catderousse ou moymoi expressementexpressément à l’heure
Qu’on leveralèvera le siegesiège en la ville demeure
635À la routteroute d’un camp tousjourstoujours y a danger
Que les souldarssoudards cassezcassés ne courent saccager
Si tosttôt qu’on sonnera. Serre serre bagage
Vous nous aurez tous deux et quelqu’autre en hostageotage
Le Syndique
Nous nous fions en vous croyez que nous ferons
640Ce que nous conseillez et qu’ingrats ne serons
NyNi envers vous monsieur nyni envers nostrenotre maistremaître
Le maire
Ô mon Dieu s’obliger à bien faire à un traistretraître
Poulin
Ça mes deux freresfrères ça allons et qu’on ne cedecède
Rien de l’honneur de Dieu à ce meschantméchant d’Opede
Le maire
645JesuchristJésus-Christ m’a donné une si vive foyfoi
Que je confesserayconfesserai l’honneur que je luylui doydois
--- 14v ---
Le Syndique
Il n’y a glaive ou feu qui m’empescheempêche de dire
Qu’il est mon seul Sauveur neni m’en facefasse desdiredédire 123
LE CHOEUR 124
La langue maudite
650En sucre et en miel
MesleMêle et rend confite
Sa 125 poison de fiel
Poison nonpareille
Qui tant seulement
655En touchant l’oreille
Tue en un moment.
Elle n’a point d’ailes
Et vollevole en tous lieux
Ses fleschesflèches mortelles
660Darde jusqu’aux cieux
De la mort la source
Source de tout mal
N’a roulé sa course
Par autre canal.
665NostreNotre premier perepère
Par elle deceudéçu
Oyant 126 la viperevipère
PechePéché a conceuconçu
PechePéché dont le gage
670L’eternelleéternelle mort
Tout l’humain lignage
Lotit sous son sort. 127
--- 15r ---
Et quand la traistressetraîtresse
Adam a perdu
675La terre elle engresseengraisse
Du sang espanduépandu
Par le parricide
Qui en taintteint ses mains
Quand le monde il vuidevide
680Du quart des humains 128
Toutes phrenesiesfrénésies
Toute fausseté
Toutes heresieshérésies,
Toute impieteimpiété
685La langue fait croire
Pour la veritévérité
Et le Dieu de gloire
EstreÊtre vanité.
Ce que langue on nomme
690Ce feutfut le docteur
Qui feitfit que Sodome
AbysmaAbîma d’horreur 129
Elle est la sereinesirène
Qui doux en chantant
695Dans le gouffre meinemène
Quiconque l’entend
Les Juifs tant affole
Que de leur thresortrésor
--- 15v ---
FondansFondant une idole
700Dressent le veau d’or
LuyLui font sacrifice
Sans aucun remord
Joyeux en leur vice
Y dansent d’accord 130
705Et à Samarie
Fausse promet l’heur 131
De veoirvoir de Syrie
Son prince vainqueur
Qui d’une sagette 132
710Tout outre persépercé
CheutChut 133 de sa charrette
Mourant renversé 134
D’une eau fort petite
L’honneur du torrent
715Commençant sa fuite
Si roideraide la rend
Que les rocs il roule
TirezTirés de leur fort
Ainsi qu’une boule
720Partant d’un bras fort
Ainsi d’une mouche
La langue nous rend
Tant soit peu la touche
Un grand ElephantÉléphant 135
725D’elle vint la rage
PourquoyPourquoi ce grand tout
--- 16r ---
Noyé par naufrage
Fut de l’eau en bout 136
Et sa fin soudaine
730Viendra par le feu
Que cestecette vilaine
SoufleSouffle peu à peu
Comme d’une amorce
On veoitvoit ondoyer
735La flamme qu’à force
On ne ne peut noyer
Elle calomnie
TousjoursToujours veritévérité
Et tousjourstoujours denie,
740La droite equiteéquité
Par elle le vice
Est nommé vertu
Et droit et justice
Ce qui est tortu. 137
745Mais qui rompt les trevestrêves
CouvansCourant trahison
Ou qui fait les vefvesveuves 138
N’est -ce toytoi tison
Qui langue te nommes
750Langue qui du flanc
Des plus divins hommes
Fais courir le sang
--- 16v ---
Langue veneneusevénéneuse
Au marymari sa foyfoi
755La plus vertueuse
Viole par toytoi
La vierge pudique
Tu livres en main
Au paillard lubrique
760Lubrique putain
Qui pertperd la jeunesse ?
Tes allechemensallèchements
Qui pertperd la vieillesse ?
Tes enchantemensenchantements
765Du bien tu devises
Lequel te desplaistdéplaît
Car tu te deguisesdéguises
Ainsi qu’il te plaistplaît
Par toytoi la sourcieresorcière
770Murmurant ses vers
Nos corps en poussierepoussière
Anime de vers
La lune ensanglante
Et fait remonter
775L’eau precipitanteprécipitante 139
Et les monts sauter
La langue s’asseure 140
De meritermériter lozlos 141
Si elle demeure
780Muette en son clos
Clos fait de densdents fortes
Où en serre elle est
--- 17r ---
Comme entre deux portes
LuyLui servansservant d’arrestarrêt
785La fierefière meurtrieremeurtrière
SecretementSecrètement fait
Que pleine est la bierebière
De ceux qu’ell’defaitdéfait
Le jus qu’elle cache
790En un petit bout
Si elle le crache
Empoisonne tout
Pourtant j’ayai grand doute
Que ton oraison
795Poulin ne soit toute
Toute trahison
Car un mercenaire
Du Turc ne craint point
Pour gain de defairedéfaire
800Le corps à Christ joint.
Si donques ô sire
Ce troupeau te plaistplaît
Ta main le retire
De mort où il est
805Et auzaux bords estrangesétranges
De chascunechacune mer
Tes hautes louanges
FaironsFerons escumerécumer 142
--- 17v ---
D’opede
A finAfin que Poulin mieux paracheveparachève son oeuvre
810Et que nul de ceux cy-ci oisif ne le descoeuvre 143
Je les vayvais empescherempêcher à deduire 144 leur foyfoi
Amis il n’est besoin que nous allions au RoyRoi
Si vous me déclarez ce qui est en ce rolle 145
Je vous escouterayécouterai sans dire une parolleparole
Le Choeur
815EscoutezÉcoutez tous souldarssoudards 146 Gendarmes regimensrégiments
Comme Dieu par ses faits parolleparole et sacremenssacrements
Qui sont de sa clarté les trois evidensévidents signes
Se manifeste à ceux qui s’en sentent indignes
Le Syndique
L’escuécu de nostrenotre foyfoi nostrenotre victoire est tel
820Qu’au seul Dieu nous croyons qui seul est immortel
Le maire
Au Dieu qui seul est Dieu distinct en trois personnes
Qui tout de rien a fait et n’a fait qu’oeuvres bonnes
Le Syndique
Au Dieu qui de trois doitsdoigts ballançantbalançant ce grand tout
Le roule egalementégalement de l’un à l’autre bout
Le maire
825Au Dieu qui a lié d’une rondeur egalleégale
De toutes parsparts en soysoi cestecette tant grosse balle
Le Syndique
Au Dieu qui tient unis par accordansaccordants discorsdiscords
Les grands membres qui sont divers en ce grands corps
Le maire
Au Dieu qui fait virer et sans cesse desvuydedévide
--- 18r ---
830Au tourAutour de deux pivets le rond de ce grand vuidevide
Le Syndique
Au Dieu qui quand il veut tout le monde estonnerétonner
Ne fait sinon qu’un peu sa voix haute entonner
Le maire
Au Dieu qui fait nager sur les monts dedans l’onde
Les Dauphins de la mer s’il en levelève la bonde
Le Syndique
835Au Dieu qui la mer change en beaux champs defrichezdéfrichés
Empoudrant dans le fonds les poissons dessechezdesséchés
Le maire
Au Dieu qui jusqu’au ciel la vallée emmontaigneemmontagne
Et le mont sourcilleux applanitaplanit en CampaigneCampagne
Le Syndique
Au Dieu qui à la fin bruslerabrûlera l’univers
840Et sauvera les siens en perdant les pervers
Le maire
Au Dieu qui hait péché pour qui la Terre endure
BruslantBrûlant tantosttantôt de chauldchaud et tantosttantôt de froidure
Le Syndique
Soit qu’approchant la Torche il allonge les jours
Ou soit que l’eslongnantéloignant il les rongnerogne plus courts
Le maire
845Quand la terre est de soif beantebéante et embrasée
Il l’abbreuveabreuve et refait de sa pluyepluie et rosée
Le Syndique
Fait -elle trop la brave ? Il la despouilledépouille aussi
LuyLui ridant l’estomachestomac en glace tout transi
--- 18v ---
Le M.Le Maire
De neige il l’enfarine et la testetête chenue
850Il couvre de frimas où seroitserait toute nue
Le S.Le Syndique
Quant au poisson il fait un marbre de son eau
L’empierrant vif dedans ainsi qu’en un tombeau
Le M.Le Maire
C’est luylui qui seul refond ce marbre en son mol estreêtre
Et fait d’un tel ChrystalCristal l’eau coulante renaistrerenaître
Le S.Le Syndique
855Quand la bise enferrée en mille chants nouveaux
Par Zephire il enchante à l’ennuyennui les oiseaux
Le M.Le Maire
C’est luylui qui d’un regard de son grand oeil du monde
CesteCette meremère de tous rend chascunchacun an fecondeféconde
Le S.Le Syndique
De ses fleurs diaprée en cent mille couleurs
860Puis grosse de tous fruits engendrezengendrés de leurs fleurs
Le M.Le Maire
Qu’il garde et fait meurirmûrir jusqu’au vineux Automne
Lors sa main liberalelibérale à tout le monde en donne
Le S.Le Syndique
VrayVrai que pour nos meffaitsméfaits quelquefois Souverain
Tu fais le ciel de fer et la terre d’airain
Le M.Le Maire
865Bref tes faits ô Dieu sont faits si admirables
Qu’autre n’en feitfit n’en fait n’en fairafera de semblables
Le S.Le Syndique
Par les seuls faits pourtant du tout bon toutpuissanttout-puissant
Qui est l’enfant d’Adam de son Dieu cognoissantconnaissant ?
--- 19r ---
Le M.Le Maire
En lieu d’y veoirvoir bien clair de soysoi nostrenotre nature
870(Ignorant animal) pleine est de nuictnuit obscure
Le S.Le Syndique
L’aveugle ainsi ne peut du jeu de l’acteur
Bien qu’il soit au theatrethéâtre en estreêtre spectateur
Le M.Le Maire
Ainsi ne peut le sourd ce qu’on lui dit entendre
NyNi l’impotent manchot ce qu’on luylui donne prendre
Le S.Le Syndique
875Pourtant aussi d’ailleurs Dieu a l’homme esclairééclairé
S’estantétant son createurcréateur et sauveur declairédéclaré
Par le miel distillant de sa divine bouche
Le M.Le Maire
Donc si divinement tous ses sens il luylui touche
Qu’il cognoitconnaît comme Dieu l’avoitavait au plus beau lieu
880De la terre en honneur mis comme un demydemi-Dieu
Car quand il eut portrait sur sa divine idée
Sa Corne d’abondance fut en luylui si vuidéevidée
Qu’il n’y avoitavait un tel chef -d’oeuvre sous les cieux
Le S.Le Syndique
Il l’avoitavait tout comblé des presensprésents de son mieux
885Soit de sa crainte, amour, justice, cognoissanceconnaissance,
Soit de sagesse, force, et vrayevraie obeissanceobéissance.
Le M.Le Maire
Ou soit d’authoritéautorité et d’un exquis sçavoirsavoir
Soit d’un pur jugement soit d’un livre pouvoir
De tenir droit le cours de toutes ses pensées,
890OEuvres et volontés saintement compassées 147
Le S.Le Syndique
Vous comteriezcompteriez plustostplutôt les celestescélestes flambeaux
Les pleurs de l’occeanpcéan et le bords de ses eaux
--- 19v ---
Que les biens que receutreçut cestecette fange animée
De l’autheurauteur qui l’avoitavait si richement formée
Le M.Le Maire
895Ô largesse ! ô faveur ! ô libéralité !
Le S.Le Syndique
Ô Adam plus qu’ingrat ! quelle desloyautédéloyauté
D’avoir creucru l’ennemyennemi de tout l’humain lignage
Et sacrilegesacrilège estaintéteint du Dieu vivant l’image !
Le M.Le Maire
Il s’est faictfait ignorant esclave du pechépéché
900De son Dieu adversaire à SathanSatan attaché
N’ayant pas seulement du bien la seule envie.
Le S.Le Syndique
En tout vice plongé il ne peutput en sa vie
Produire que pechépéché pechépéché le fruit de mort
Comme engendre le vers la charrongnecharogne d’un mort.
Le M.Le Maire
905PechéPéché bouillone en luylui et la race il y plonge
Qui s’en emboit 148 ainsi comme d’humeur l’espongeéponge
Le S.Le Syndique
Tout le parfait change de sa perfection
En la perversité de sa corruption
Il ne retient plus rien de ses divines gracesgrâces
910Sinon (outre tout mal) du bien perdu les traces
Le M.Le Maire
Comme quand de l’orgueil d’un superbe ChasteauChâteau
Qui les cieux menaçoitmenaçait d’un haut rocher en l’eau
Ne reste qu’un bourbier sepulchresépulcre de ruines
Couverte d’une horreur de ronces et d’espinesépines
--- 20r ---
Le S.Le Syndique
915Pour s’estreêtre malheureux de tout bien despouillédépouillé
Et pour s’estreêtre meschantméchant en tout pechépéché souillé
Dieu juste l’a jugé à la mort eternelleéternelle
Et si fait gracegrâce encorencore au condamné rebelle
Le M.Le Maire
GraceGrâce par JesuchristJésus-Christ qui pour cela s’est fait
920Semence de la femme et a pechépéché defaitdéfait
Et la mort, par la mort satisfaisant au PerePère
Le S.Le Syndique
Par la mort qui occit l’homicide viperevipère
Le M.Le Maire
Par la mort qui seule est l’acquit de nos forfaits
Le S.Le Syndique
Par la mort qui seule est notre rançon et paix
Le M.Le Maire
925Par la mort qui seule est de la mort la victoire
Le S.Le Syndique
Par la mort qui seule est de tous ChrestiensChrétiens la gloire
Le M.Le Maire
Par la mort qui seule est le sacrifice entier
Qui seul l’homme refait des hauts cieux heretierhéritier
Le S.Le Syndique
Par la mort qui seule est divinement puissante
930D’abolir et la coulpe 149 et la peine sanglante
Le M.Le Maire
Par la mort qui seule est le vrayvrai et seul moyen
PourquoyPourquoi Dieu de son droit fait gracegrâce et n’en perd rien
Le S.Le Syndique
Car justice au pechépéché innocemment cruelle
Et la gracegrâce au pecheurpécheur saintement paternelle
935Ont le pechépéché destruitdétruit et le pecheurpécheur sauvé
Par cestecette mort où Dieu juste et bon est trouvé
--- 20v ---
Le M.Le Maire
OÔ divine bonté ! ô sagesse infinie
Ô abysmeabîme d’amour qui par l’ignominie
D’une maudite croix en quittant le forfait 150
940Au droit de ta justice entiereentière a satisfait
Le S.Le Syndique
PerePère tu es la source et la cause premierepremière
Du salut des esleusélus et ton fils la matierematière
La FoyFoi est l’instrument par qui 151 le S. 152 Esprit
Nous le fait recevoir de toytoi en JesuschristJésus-Christ
Le M.Le Maire
945EstantÉtant ainsi sauvezsauvés par la divine gracegrâce
Il faut qu’à Dieu chascunchacun obeissanceobéissance facefasse
Non pas en la façon que l’enragé bigot
Invente en son cerveau pour se monstrermontrer devotdévôt.
Le S.Le Syndique
Tout service forgé est devant Dieu infameinfâme
950Plus que devant nos yeux les draps souillezsouillés de femme
Le M.Le Maire
Combien de fois Seigneur as -tu dit en ta loyloi
Si je suis vostrevotre Dieu mon peuple servez moy-moi
Sans rien changer ou mettre à ce que je commande
L’obéir seul me plaitplaît et non pas vostrevotre offrande
Le S.Le Syndique
955Je veux dit -il aussi que prompts de coeur et main
Vous secouriez heureux chascunchacun chascunchacun prochain
Vous fait -il mille torts ? pour le mal bien luylui faites
Ce sont de charité mes saintes loixlois parfaites
Le M.Le Maire
HelasHélas qui est celuycelui qui en a le pouvoir ?
960Pouvoir ! ains 153 qui en peut le seul desirdésir avoir
--- 21r ---
PourcePour ce 154 la loyloi condamne equitablementéquitablement l’homme
Debteur 155 à son Seigneur de la totale somme
Que par sa seule faute il ne scauroitsaurait payer
Le S.Le Syndique
PourceParce qu’il a perdu jusqu’au dernier denier
965Tout ce qu’il avoitavait eu de la bonté divine
À son oeuvre enrichir prodiguement benignebénigne
Le M.Le Maire
Comment payrapaiera -t-il donc ? qu’il aille à JesuschristJésus-Christ
Qui cancellant 156 la debtedette et le contractcontrat escritécrit
Mourant l’a dechirédéchiré en la faveur du pouvre 157
970Qui par Christ acquitéacquitté son bien perdu recouvre.
Le S.Le Syndique
Sommes -nous derechef sous le pechépéché plongés
Allons à JesuschristJésus-Christ pour estreêtre soulagezsoulagés
Et par son Saint Esprit de nous fiante et ordures
Saintement il fairafera nouvelles creaturescréatures
Le M.Le Maire
975Allons allons à luylui et nous y puyseronspuiserons
Mille fois plus de bien que nous ne jugerons
Nous defaillirdéfaillir allons à luylui de bon courage
Car plus que reparéeréparée il a de Dieu l’image
JoingnantJoignant en un corps l’homme et la divinité
Le S.Le Syndique
980ArriereArrière donc d’Adam premierepremière dignité
Puisque perdre il t’a peupu par sa cheutechute mortelle
Mais celle que Christ donne est sans fin eternelleéternelle
L’emphyteoseemphytéose 158 estantétant en commis expiré
Adam merveilleux gain de sa perte a tiré.
--- 21v ---
Le M.Le Maire
985Pour ne le perdre plus Christ par son sacrifice
Incessamment nous rend Dieu son perepère propice
Nous ayant consacrezconsacrés tous sacrificateurs
Pour offrir en son nom du profond de nos coeurs
À son PerePère non point de boeufs moutons et chievreschèvres
990Mais en Esprit et foyfoi les bouveaux 159 de nos levreslèvres
Le S.Le Syndique
Encor’Encore icyici faut -il que le Saint -Esprit soit
CeluyCelui qui dans nos coeurs les prieresprières conçoit
Le M.Le Maire
Il nous faut craindre Dieu l’aimant d’amour non vaine
Nous faut aimer le bien le vice avoir en haine
Le S.Le Syndique
995Nous met sa loyloi au coeur l’engrave et l’y escritécrit
Nous nettoyenettoie arrousezarrosés du sang de JesuschristJésus-Christ
Le M.Le Maire
Et nourrit de son corps nos amesâmes affamées
Pour estreêtre de la mort eternelleéternelle sauvées
Le S.Le Syndique
Nous appliquant tout Christ ainsi qu’Il est le corps
1000Des umbresombres de la loyloi pour nous animer morts
Le M.Le Maire
À finAfin que conduisions nostrenotre mortelle course
À l’honneur du Seigneur de tous nos biens la source
D’ope.D’opède
Mais qui est cestuy celui-là qui s’en vient droit à moymoi ?
Est -ce Poulin ? oui, c’est bien luylui je le voyvois
1005Je vous orrayouïrai 160 tantosttantôt, si quelque chose reste.
--- 22r ---
Ô villains dangereux sept fois plus que la peste
Je vous ferayferai mourir par tourmenstourments si cruels
Que Phalaris 161 jamais n’en inventa de tels. 162
Le Coeur 163
Telephe 164 ne peutput onques 165
1010Trouver allegementallègement
NeNi remedesremèdes quelconques
Au mal de son tourment
Sinon que de sa lame
Le Grec cruel humain
1015La vieille playeplaie entame
Ja 166 faite de sa main 167
Ainsi, ô langue blemeblême
Qui n’a guerenaguère elancoisélançais
Tes dards contre toytoi mesme-même
1020Si fort t’en meurtrissoismeurtrissais
Qu’ores nulle momie
Ne t’en peut secourir
Par ta palinodie
Seule te peux guarirguérir
1025La plante dont Mercure
Arma le fin Gregois
AvoitAvait cestecette nature
Que Circe de sa voix
Vers remachés neni poudres
1030Malfaire ne pouvoitpouvait
NeNi de jus neni de foudres
À celuycelui qui l’avoitavait 168
--- 22v ---
Tel MolyMoli 169 que la langue
Ne fut onc sous le Ciel
1035Le fruit de sa harangue
Est un fruit tout de miel
Qui succrantsucrant les oreilles
Faire ouyrouïr voire aux morts
Ô Dieu les grands merveilles
1040Des tes divins thresorstrésors.
Nulle autre ne revelerévèle
Le salut precieuxprécieux
NeNi l’amour paternelepaternelle
Qu’en ton fils glorieux
1045Tu monstresmontres à nous hommes
PlainsPleins de desloyautédéloyauté
Qui tousjourstoujours ingrats sommes
Envers ta grand bonté
Sans elle à l’Evangile
1050Qui le souverain bien
SainctementSaintement nous distille
NeNi croiroitcroirait le chrestienChrétien
Cent mille piperies 170
Des affronteurs caphardscafards 171
1055NeNi seroientseraient point haïeshaies
NeNi leurs masques ne fards
Un bien petit boysbois guide
CaÇà et là les grands naufs 172
Un petit mords de bride
--- 23r ---
1060Retient les fiers chevaux
Et la foiblefaible tenaille
Le gros barreau de fer
Que le forgeur entaille
Et puis fait rechaufferréchauffeur.
1065La langue ainsi gouverne
Petite qu’elle soit
Tout le monde et prosterne
Quiconque 173 nous deçoitdéçoit
Sans elle nulle ville
1070N’a estéété neni seroitserait
NeNi l’arme en soc utile
Changée on ne verroitverrait
Elle seule discorde
MeineMène et les mutins ords 174
1075Tous de chainechaîne et de corde
Les bras liezliés au corps
Par elle ils se bannissent
De toute cruauté
Et à la paix s’unissent
1080Contraints de volonté
L’ire l’homme surmonte
Et le fait furieux
Mais la langue le domtedompte
Et le rend gracieuxgrâcieux
1085Elle à David retire
--- 23v ---
Les armes de la main
Ja ja 175 prestprêt à occire
Nabal trop inhumain 176
À la peur couppecoupe l’aile
1090LuyLui faisant tenir bon
D’une victoire belle
Lui monstrantmontrant le guerdon
Au contraire elle glace
Des plus cruels le coeur
1095Leur palissantpâlissant la face
D’une fuite d’honneur
Qu’au prochain on ne nuysenuise
Violant l’équité
Par la langue est apprise
1100La loyloi de ChariteCharité
D’elle est le mariage
Lien du genre humain
Qui estendétend d’aageâge en aageâge
NostreNotre passé demain
1105Si le corps navré 177 seignesaigne
En danger de mourir
La langue nous enseigne
Comm’Commeil le faut guairirguérir
Par celle d’Hippocrate
1110S’appliquent tous les jours
Au cerveau foyefoie et rate
Mille presensprésents secours.
--- 24r ---
La langue outre console
Le mortel tourmenté
1115Du goustgoût de la parolleparole
Le pouvrepauvre est sustenté
Et les coeurs des debilesdébiles 178
En sont fortifiezfortifiés.
Les vefvesveuves et pupilles
1120GardezGardés de torts et grief
Par elle un des prophetesprophètes
Multiplie vingt pains
Dont cent bouches refaites
Plus en reste en leurs mains
1125D’elle l’huile regorge
Le rachaptrachat des mineurs
RetirezRetirés de la gorge
Des cruels crediteurscréditeurs
La femme Sunamite
1130Son fils mort vivre voit
Par une voix beneitebénite
De l’hostehôte qu’elle avoit 179 180
Par famine opressée
Ayant erré sept ans
1135Par la langue adressée
Au royroi receutreçut ses champs
RoyRoi dont David fut perepère 181
RoyRoi sur tous triomphant
À la dolente meremère
--- 24v ---
1140Ta voix rend vif l’enfant
Et l’enfant mort à celle
Qui au vif n’avoitavait rien
Ayant sous son aisselle
De nuit estaintéteint le sien
1145Si dru ne court la bise
Les chesneschênes arracher
Qu’à une voix se brise
L’audace de la chair
Si qu’en 182 laissant le vice
1150Le pecheurpécheur n’est plus tel
Ou bien sans qu’il guairisseguérisse
Il chet 183 d’un coup mortel
Quand Nathan vituperevitupère
Au nom de Dieu David
1155Le meurtrier adultereadultère
Se repentir il vit 184
La seule voix d’Elie
Le double Achab reprit
Les prestresprêtres de Bal lie
1160Qui le peuple meurtrit
À la parole seulleseule
De Jehu les limiers
DetrenchentDétranchent en leur gueule
Jezabel à quartiers 185
1165Et à celle de Pierre
L’hypocrite aumosnieraumônier
Tomba tout mort par terre
Et ne fut le dernier 186
--- 25r ---
Et contreignantcontraignant sa force
1170Sa douceur en priant
De rendre à Dieu s’efforce
Tout genouilgenoux bas ployant
Jusques aux bords où le more
Plonge ses noirs cheveux
1175Elle fait qu’on adore
L’eterneléternel par saints voeusvoeux
Elle invite à priereprière
Le coeur froid sommeillant
Quand priant la premierepremière
1180Survient le reveillantréveillant
Comme si premier prie
Le Coeur la langue esmeutémeut
Tellement qu’elle crie
Tout ce que le coeur veut
1185Anne pour estreêtre meremère
Du juste Samuel
Emflambant sa priereprière
D’un voeu continuel
D’ardeur ses levreslèvres ouvre
1190Pour parler maintefoismaintes fois
Son coeur donc se decoeuvredécouvre
Et provoque sa voix 187
CestCet accord tant louable
De la langue et du coeur
1195Le PechierPêcher delectabledélectable
DemonstreDémontre apresaprès sa fleur
--- 25v ---
Car à son fruit ressemble
Le coeur si rondement
Qu’à sa fueillefeuille qui tremble
1200La langue droitement
Ô personnes heureuses
Des quellesDesquelles pour la mort
Les langues non peureuses
Avec le coeur d’accord
1205De reclamerréclamer ne craignent
JesuschristJésus-Christ pour leur RoyRoi
NeNi pour tyran se feignent
De declarerdéclarer leur foyfoi.
C’est ce qu’ont fait sans feinte
1210Dedans un camp armé
Ces deux d’une voix sainte
Et d’un coeur animé
Ô que leur foyfoi tresampletrès ample
Qu’on leur oytoit 188 prononcer
1215À vous serve d’exemple
Pour JesusJésus confesser
Si 189 qu’en paix et en guerre
Toute langue de coeur
Chante dessus la Terre
1220La loz 190 de sa grandeur
Qui seul sur soysoi deschargedécharge
Les pecheurspécheurs accablezaccablés
Les rendansrendant (douce charge !)
De sa gracegrâce comblezcomblés 191
--- 26r ---
Dop.D’opède
1225Mais un homme de bien tient tousjourstoujours sa promesse
P.Poulin
Si elle est contre Dieu de passer outre 192 il cesse
DD’opède
Nous sommes resolusrésolus que de Dieu il n’est point
PPoulin
Sa crainte toutesfoistoutefois les meschansméchants mord et poind
DD’opède
CesteCette crainte j’estime estreêtre des sots le vice
PPoulin
1230AumoinsAu moins craignez le RoyRoi armé de sa justice
DD’opède
Qui jamais luylui feroitferait le tout au vrayvrai entendre
PPoulin
Qui ? le sang des martyrs et des bruslezbrûlés la cendre
DD’opède
La cendre neni le sang ne peuvent point parler
PPoulin
Le sang d’Abel a fait devant Dieu bruire l’air 193
DD’opède
1235Si les ElephansÉléphants sont transformeztransformés en corneilles
PPoulin
Les rois ont longues mains grands coeurs bonnes aureillesoreilles
DD’opède
Ce qui est arrestéarrêté doit tenir par raison
PPoulin
OuyOui 194 de retourner chascunchacun à sa maison
DD’opède
Retourner on ne doit sans son dessein parfaire
PPoulin
1240PoursuyvrePoursuivre l’on ne doit en un meschantméchant affaire
--- 26v ---
D.D’opède
Tirez donc vostre espéeépée et m’en donnez au coeur
P.Poulin
Je ne serayserai de vous et moins d’eux le tueur
D.D’opède
Or sus D’opede sus que toymesmetoi même te tues
QuoyQuoi tu n’oses tu crains sus que tu t’esvertuesévertues
1245Tu tiens ta dague nue et cela est -ce tout
Tu trembles ô poltron enfonce jusqu’au bout
Tu la laisses tomber or ça je la ramasse
Et ne me puis tuer ainçois je me fais gracegrâce 195
Je ne veux que la mort et si ne puis mourir
1250Poulin faitezfaites le coup vueillezveuillez me secourir
P.Poulin
Il ne faut nyni de soysoi nyni d’autre estreêtre homicide
Allons faire sonner que ce camp d’ici vuydevide
DD’opède
Je vous requierrequiers un don Poulin un don petit
PPoulin
C’est quelque trahison que vostrevotre ire bastitbâtit
DD’opède
1255Ce que je demande est de nulle consequenceconséquence
PPoulin
PourveuPourvu que Dieu ou RoyRoi nullement je n’offense
DD’opède
Aussi ne ferez vous je vous l’asseureassure bien
PPoulin
Dites que c’est avant que je promette rien
DD’opède
Pour sauver mon honneur d’une façon civile
1260Faites que m’en allant je passe par la ville
Sans y faire sejourséjour La Composition
Telle que vous voudrez sera sans fiction
--- 27r ---
En tout de point en point estroittementétroitement gardée
La vie si j’y faux 196 me soit subit 197 ostéeôtée
PPoulin
1265Jurez -vous d’y entrer seulement vous dixiemedixième
DD’opède
Je renonce autrement ma foyfoi et mon baptesmebaptême
PPoulin
Et si tosttôt qu’y serez d’incontinent sortir
Sans que les habitants s’en puissent ressentir
DD’opède
Ô Terre ô mer ô puissance divine
1270Si aucune en y a ainsi qu’on le devine
Vous esprits familiers venez courez volez
Et en vostrevotre courrouzcourroux aujourd’huy immolez
Sous vostrevotre cruauté celuycelui qui vous invoque
Si tant peu que ce soit sa promesse il revoquerévoque
PPoulin
1275Regardez que soyez constant en vos propos
DD’opède
Pour ma fidelité vous chanterez mon lozlos 198
PPoulin
Je vais donc faire ouyrouïr 199 vistemementvitement
En haut et clair sonner par le camp la retraite
Monsieur de Catderousse et quelqu’autre avec moymoi
1280Nous en allons pour vous donner à tous la foyfoi 200
DD’opède
Les Capitaines sont tous de mon entreprise 201
Qu’en despitdépit de Poulin la ville sera prise
Cependant que le camp feindra de s’en aller
Pour amuser mes gens leur faut encor 202 parler 203
Le Maire
1285Loué soit l’Eternel qui a pris à mercymerci
Son peuple le sauvant de ce tyran icyici
Le S.Le Syndique
--- 27v ---
Ô seigneur ta vertu et ta bonté est telle
Que chanter ne les peut nulle langue mortelle
D.D’opède
AmysAmis vous me voyez ja 204 prestprêt à departir
1290Si par les SacremensSacrements me faites convertir
Le M.Le Maire
Dieu seul convertir l’homme et renouvelle et change
Si que d’un Diable on fait en un moment un ange
Le S.Le Syndique
Pour cestcette oeuvre il se sert ainsi que d’instruments
De sa parolleparole sainte et des deux sacremenssacrements
Le M.Le Maire
1295DequoyDe quoi la foyfoi en nous il produit et augmente
Le S.Le Syndique
La foyfoi nostrenotre ancre et port contre toute tourmente
Le M.Le Maire
La foyfoi qui nous fait croire ainsi que Dieu promet
Qu’unis à son cher fils de sa maison nous met
Le SLe Syndique
Nous couche en son estatétat et bouche à cour nous donne
Le M.Le Maire
1300Aux fidelesfidèles Christ là sa Sainte Table ordonne
Le S.Le Syndique
Christ qui a le mortel si precieuxprécieux si cher
Que nostrenotre ameâme il nourrit de son sang et sa chair
Le M.Le Maire
Autre nectar n’y a n’y a autre Ambroisie 205
Pour tousjourstoujours immortels vivre immortelle vie
Le S.Le Syndique
1305Ô viande ô breuvage en la croix appreciezappréciés
Pour donner vie aux morts tant peu soyent soient-ils goustezgoûtés
Le M.Le Maire
Ainsi Dieu n’est content de nous avoir fait estreêtre
--- 28r ---
Du rancrang de ses enfansenfants sans aussi nous repaistrerepaître
Le S.Le Syndique
Le baptesmebaptême est l’entrée en la maison de Dieu
1310Signe que plus bannis ne sommes en ce lieu
Comme las ! paravant 206 nous estionsétions de nature
La sang du fils de Dieu duquel l’eau est figure
Nos ordures de l’ameâme efface entieremententièrement
Ordures qui causoientcausaient nostrenotre bannissement
Le M.Le Maire
1315Encor 207 ce sacrement nous fait voir à l’oeil comme
NostreNotre perversité nostrenotre chair et vieil homme
Est mort ensevelyenseveli par vertu de la mort
Et sepulchresépulcre de Christ en ce que comme mort
Le baptisé ayant l’eau jusque sur la testetête
1320Comme enterré dessous quelque espace y arrestearrête
Le S.Le Syndique
De ce qu’il en sort vif cestecette nativité
Seconde le pur don de Christ resuscitéressuscité
Est entendue 208 à fin qu’à pechepéché mort il vive
À son Dieu purement et tousjourstoujours mieux poursuyvrepoursuivre
1325Le S.Esprit 209 en nous seul ce bien fait valoir
Nous donnant le parfaire avecques 210 le vouloir
Le M.Le Maire
Puis quePuisque cestecette entrée est du tout spirituelle
La nourriture aussi n’en peut estreêtre que telle
Or la CeneCène est le signe apparent au dehors
1330Que JesuschristJésus-Christ nous veut communiquer son corps
Nostre ameâme en substanter en l’espoir de la vie
Qui par mort ne peut estreêtre à ses membres ravie
Le S.Le Syndique
Comme le pain est propre à nostrenotre corps nourrir
Qu’on ne peut sans manger preserverpréserver de mourir
--- 28v ---
1335Le corps du Christ à l’ameâme est la seule viande 211
Qui de la mort d’enfer vivement la defendedéfende
De la mort qu’on ne peut eviteréviter nullement
Qu’en mangeant Christ par foyfoi spirituellement
Le M.Le Maire
Son sang nostrenotre ameâme aussi abbreuveabreuve et comble en joyejoie 212
1340Tout ainsi que le vin resjouytréjouit nostrenotre foyefoie
Brief nostrenotre ame recoit pleine refection
De son corps et son sang qui de sa passion
Nous rendent jouissansjouissants par une foyfoi certaine
C’est où le S Esprit 213 par la CeneCène nous meinemène.
Le S.Le Syndique
1345Nous y certifiant que Christ se donne aux siens
Si que le possedantpossédant possedantpossédant tous ses biens
Le M.Le Maire
Davantage chascunchacun fait par le saint baptesmebaptême
Profession publique et par la CeneCène mesmemême
De sa Religion par tels actes monstrantmontrant
1350Que Christ pour son sauveur il recognoitreconnaît et prend.
Le S.Le Syndique
Ainsi porte l’archierarcher le soldardsoudard 214 le gend’armegendarme
L’escharpeécharpe de son prince au milieu de l’alarme
Pour declarerdéclarer à tous estreêtre telle sa foyfoi
Qu’il est prestprêt de mourir pour l’honneur de son royroi
1355Par les SacremensSacrements donc tesmoignetémoigne le fidelefidèle
Qu’il est prestprêt de mourir pour Christ et sa querelequerelle
Le M.Le Maire
Puis que d’un seul baptesmebaptême on nous a baptisezbaptisés
Nous nous monstronsmontrons un corps sans estreêtre divisezdivisés
Aussi un mesmemême pain fait de mesmemême farine
1360Mais bien de plusieurs grains cestecette union designedésigne
--- 29r ---
Qu’on voit en ceux qui sont unis en JesuschristJésus-Christ
Comm’Commeau chef est le corps et le corps à l’esprit
Dop.D’opède
C’est assesassez Je m’en vayvais ne vous croyant non plus
Que vous croyez au Pape aux prestresprêtres et reclus
1365C’est assesassez Je ne veux d’avantagedavantage poursuyvrepoursuivre
Il est temps de me joindre à mes gens pour les suivre 215
Le Choeur
L’on voit bien à cestecette heure ô Dieu ton jugement
Lequel ton saint PropheteProphète a crié hautement
Contre tous ceux qui ont ta doctrine haïe
1370OyesOyez Pervers oyez oyez dit Esaïe
Mais sçavez savez-vous comment oyansoyant n’entendez rien 216
VoyansVoyant et regardansregardant ne cognoissezconnaissez le bien
Endurcissez vos coeurs pour obstinezobstinés vous rendre
Sans de vostrevotre salut un jotaiota comprendre
1375Vous oyez vous voyez et tout vous est scellé
Car le bras du Seigneur ne vous l’haa revelé
Le S.Le Syndique
Mais qu’est -ce que je voyvois ? qu’est cela dans la fange ?
Ô rencontre incroyable ! helashélas spectacle estrangeétrange !
Le M.Le Maire
HelasHélas et qu’est cecyceci ? mon Dieu le coeur me fend
1380C’est une femme morte embrassant son enfant
Lequel encore vif de sa petite bouche
Veut prendre le tettontéton de peur qu’il ne le touche
De l’un des bras la meremère helashélas sans sentiment
Semble le reculer du mortel aliment
1385Aussi comme craignant que de fainfaim il ne meure
Que signe d’un tel soin apresaprès la mort demeure !
Semble de l’autre bras l’approcher de son sein
--- 29v ---
Pour du sang luylui esteindre et sa soif et sa fainfaim
S’il ne tettetète il mourra et s’il tettetète une morte
1390Voire la mort aussi par l’une ou l’autre sorte
Il ne peut eschapperéchapper Elle morte en ce point
Veut qu’il la tettetète, veut qu’il ne la tettetète point. 217
Le S.Le Syndique
J’en ayai un dont ma femme est la meremère et nourrice
De meremère elle fera vers cestuy cycelui-ci office
Le M.Le Maire
1395Ô puissance divine à qui fais -tu la guerre
Las ! à qui en veux -tu à un seul ver de terre
HelasHélas ! helashélas ! voicyvoici un trop cruel departdépart
Le S.Le Syndique
Quel ennuyennui vous saisit et vous tourmente à part
Le M.Le Maire
C’est icyici mon enfant cestecette morte est ma femme
Le Choeur
1400Cela n’est rien voyez Cabriere est toute en flamme
Les SoldarsSoldats sont entrezentrés qui mettent tout à feu
Si subit 218 que jamais ne l’ayons apperceu 219 !
Le S.Le Syndique
Voyez la terre et l’air jusques au haut des nues
Forcener en fumée et en flambes aigues
1405Fut -il jamais ouyouï ou trouvé par escritécrit
Si cruels ennemysennemis que ceux de JesuschristJésus-Christ 220
Le Choeur
Ne chante que pleurs mon Ode
CryCri 221 que le cruel Herode 222
Ne fut onc 223 si outrageux
1410Que d’Opede est furieux
Le payenpaïen juif perepère et perepère
N’occit ne tous leurs enfansenfants
--- 30r ---
N’employant sa main meurtrieremeurtrière 224
Sur ceux de plus de deux ans
1415Mais mon Dieu combien le passe
La cruauté de ce Thrace
Qui destruitdétruit quelle fureur !
Quelle rage quelquelle horreur !
Les enfansenfants naisnés et à naistrenaître
1420Ceux qui engendrezengendrés les ont
Et les ayeulxaïeux de leur estreêtre
Las ! par luylui tous meurtris sont
Ô Roy tresheureuxtrès heureux s’il venge
Le rapt meurtre et sac estrangeétrange
1425Qu’a fait ce loup furieux
Des enfansenfants du Dieu des cieux
Mais si tant peu soit encore
Vivre il souffre ce meschantméchant
Qui son sceptre deshonnoredéshonore
1430Il s’en ira trebuschanttrébuchant
SaulSaül perdit sa couronne
PourceParce que laschelâche il pardonne
Pensant se faire valoir
Contre Dieu et son vouloir
1435Au Roy des Amalechites
Qui par sa grand 225 cruauté
AvoitAvait de ce monde ostéôté
La fleur des IsraelitesIsraélites 226
Mais David tout au contraire
--- 30v ---
1440Est heureux faisant defairedéfaire
Les deux qui avoientavaient occis
Isboseth l’unique fils
Restant de royale race 227
Ainsi Dieu veut que tout RoyRoi
1445Des meurtriers 228 justice facefasse
Ou qu’il tombe en desarroydésarroi
Or le seigneur quoy quoiqu’il tarde
Puis que sur tout il prend garde
Rendra le juste paymentpaiement
1450À ce meschantméchant garnement
Bien que des prisons il sorte
Par les juges corrompus
Les clos d’enfer neni la porte
Par luylui ne seront rompus
1455Cependant sa conscience
Bourreau plainplein de deffiancedéfiance
Le privant de tout sejourséjour
Le tuera cent fois le jour
Sans qu’il aytait nulle puissance
1460De mourir Au demeurant
Toute la resjouyssanceréjouissance
SeroitSerait mourir en mourant
Rien n’aura qui tant luylui plaise
NeNi qui redouble son aise
1465Comme si le dard mortel
--- 31r ---
Aux maux le livre immortel
La mort est son esperanceespérance
Et son plus grand bien seroitserait
Quand pour toute delivrancedélivrance
1470Sa mort prochaine il verroitverrait
Les foudres et les tempestestempêtes
ParmyParmi un troppeautroupeau de bestesbêtes
Si dru n’abattent le corps
À terre tous roidesraides morts
1475Comme le Ciel se courrouce
Et de dards pleins de venin
VuideVide dessus 229 luylui sa trousse
Encor 230 luylui est trop beninbénin
Cent pestes ja 231 le saisissent
1480Mille rages l’envahissent
Mil 232 fievresfièvres et feux ardensardents
BrulentBrûlent jà son corps dedensdedans
DesjaDéjà je le voyvois sans cesse
S’élancer desesperéDésespéré
1485Et en sa plus grand destresseDétresse
EstreÊtre du sang alteréaltéré
Pour estaindreéteindre telle rage
Ne pouvant trouver breuvage
Il veut boire en un estangétang
1490Dont les sources soient de sang
Là pour eau desalterantedésaltérante
--- 31v ---
Dont il seroitserait soulagé
Le sang beubu son feu augmente
Tant qu’il devient enragé.
1495Ja 233 de tous costezcôtés qu’il voyevoie
Il n’appercoitaperçoit que l’OrfayeOrfraie
Que les morts et leurs tombeaux
Les hiboux et les Corbeaux
Son haleine est plus puante
1500Que ne pue 234 un serpent mort
Ou charoignecharogne se baignante
Au venin qui d’elle sort
Puis son sang on luylui fait rendre
Pour Enfer las de l’attendre
1505Avec syringuesseringues et fers
Hors des veines et des nerfs
De son corps tant deshonestedéshonnête
Ains 235 d’un monstre si puant
Que des piezpieds jusqu’à la testetête
1510L’hippomainehippomane 236 en est fluant
Que vomiroitvomirait un tel gouffre
Mais plustostplutôt miniereminière à souffre
Sinon toute puanteur
Pour empunaisir 237 le coeur
1515Qui est l’homme qui devine
Tout le sang qu’il va beuvantbuvant ?
Tant n’en beutbut d’Agrigentine
L’airain sur le feu bramant 238
--- 32r ---
Voy Vois-je pas desjadéjà qu’on livre
1520Son ameâme du corps delivredélivre 239
Aux enfers et aux tourmenstourments
Et eternelséternels grincements
Cependant cestecette famille
De martyrs victorieux
1525Comm’Commeau perepère plaistplaît la fille
À Dieu plaira dans les cieux
Poulin
Ô malheureux d’Opede ! Ô Poulin malheureux !
Malheureux Catderousse ! Ô soldarssoldats furieux !
Ô chrestienschrétiens bienheureux ! ChrestiennesChrétiennes bienheureuses !
1530Ô combien vos morts sont devant Dieu précieuses !
AmysAmis oyez, oyez la barbare fureur
Ô cruautecruauté cruelle ô rigoureuse horreur !
Je suis cause du sac : ma langue au moins confesse 240
Que tout ce sang par toytoi est espanduépandu traistressetraîtresse
1535Mon delictdélit est trop grand pour en avoir pardon
Le Syndique
Contez -nous le massacre, octroyez -nous ce don
Le Maire
Ouvrez les yeux l’oeil peut vous faire tout entendre
Cabriere n’est plus rien que feu fumée et cendre
Le Choeur
Reprenez vostrevotre aleinehaleine et nous dites 241 comment
1540VostreVotre promesse effet n’a nyni vostrevotre serment
Poulin
D’opede ayant cassé ce sembloitsemblait son armée
La porte ne luylui est n’ 242 à dix autres fermée
--- 32v ---
Alors que l’on pensoitpensait loin de là les soldars 243
Il entre et à couvert suivysuivi par les pendarspendards
1545Se saisit de la porte eux entrezentrés à la file
Surprennent le chasteauchâteau ayant surpris la ville
Mettent le feu par toutpartout. D’opede voit de loin
VostreVotre femme Syndicq’ qui cachoitcachait en un coin
VostreVotre petit enfant il y court tout sur l’heure
1550Le fait cercherchercher à finafin que l’un et l’autre meure
La meremère pour son fils se presenteprésente à la mort
Priant et repriant entre ses bras le sort
Et luylui dit le voyant qu’il se prenoitprenait à rire
Si vous ne cognoissezconnaissez vostrevotre prochain martyre
1555Voyez que vostrevotre meremère en pleurs et larmes fond
HelasHélas ! mignon autant vous petits yeux en font
Faites bas le petit et par vostrevotre innocence
Impuissance à parler par vostrevotre contenance
Des larmezlarmes de vos yeux de vos tendrettes mains
1560Priez messieurs mignons d’estreêtre envers vous humains
Mais quoyquoi ? la cruauté en lieu d’estreêtre arrestéearrêtée
S’enflamma de plus fort par pitié irritée
Ce que la meremère obtient premierepremière elle mourra
Puis son enfant le tiers 244 le perepère souffrira 245
1565L’enfant pour estreêtre yssuissu de diabolique secte
L’engenceengeance des serpents en l’oeuf mesmemême est infecte.
Le Syn.Le Syndique
Nous sommes donc serpensserpents puisqu’en Dieu nous croyons
Et nos petits enfansenfants sont oeufs de Scorpions
P.Poulin
On les verroitverrait dit -il qui les laisseroitlaisserait croistrecroître
1570« MereMère il poursuytpoursuit veux -tu le Pape recognoistrereconnoître 246
« Pour celuycelui qui nous peut absoudre et condamner
--- 32ar ---
Et ainsi comme Dieu nous sauver et damner
Et ton fils ne sera pour ce coup mis en cendre »
Mais vostrevotre femme au lieu d’une telle offre prendre
1575« Mon fils dit -elle meure 247 et mon marymari et moymoi
PlustostPlutôt que renoncer ô seul sauveur ta foyfoi»
Le meschantméchant forcené de veoirvoir un tel courage
Les fait jetterjeter au feu pour esteindreéteindre sa rage
La meremère s’escriantécriant mon fils ô double dueildeuil !
1580CesteCette flamme fera de nous deux un cercueil
Petit tesmointémoin de Christ dans cestecette flambe horrible
Vous bruslezbrûlez avec moymoi sentant la mort terrible
Ainsi tous deux bruslansbrûlant sont morts pour Jesuchrist
Le M.Le Maire
Et le Seigneur au ciel a receureçu leur Esprit
Le Syn.Le Syndique
1585Pour le regnerègne de Christ ô tendre creaturecréature
Mon fils tu as souffert petit la mort bien dure
Ma fidellefidèle compaignecompagne a monstrémontré par effet
Que ChrestienneChrétienne elle estoitétait de parolleparole et de fait
Le M.Le Maire
Revenez s’il vous plaistplaît à la cruelle histoire
1590Par laquelle augmenter JesuschristJésus-Christ veut sa gloire
P.Poulin
ApresAprès ce j’entendientendis les plus grands hurlemenshurlements
J’y cours helashélas ! c’estoyentétaient rapts et violemensviolements 248
Des filles que faisoitfaisait Pannisse dans le temple
Puis vives les brusloitbrûlait. D’Opede à son exemple
1595Tous ceux -là qu’honnoroithonorait saintement le poil blanc
EsgorgeoitÉgorgeait au chasteauchâteau se baignant en leur sang
Tout ce massacre il fait pour avoir leur substance
SoldarsSoldats dit -il soldarssoldats fait n’a pas qui commence
Ne pensez pas non non qu’il soit temps que cessions
--- 32av ---
1600Tuez tuez tuez car leurs possessions
Avoir je ne pourraypourrai si quelqu’un en eschappeéchappe
Voudriez -vous espargnerépargner les ennemysennemis du Pape
Tuez souldarssoldats tuez et luylui criant ainsi
Regarde ses meurtriers leur voit le coeur transytransi
1605Et de crier plus fort que cesse entre les armes
L’esgardégard de l’aageâge ou sexe ou des pleurs et des larmes
Ce vaillant Hannibal 249 ce superbe vainqueur
Enflambant 250 par ces cris de ses soldarssoldats le coeur
Luy-mesmeLui-même les enfansenfants avec les meresmères rengerange
1610Pesle-meslePêle-mêle enfermezenfermés en une mesmemême grange
Craignant qu’un Orphelin eschappantéchappant de bon-heurbonheur
Ne feitfît un jour vuydervider de son bien ce voleur
En ce lieu il enserre 251 avec les femmes grosses 252
Les autres vierges (Las ! quelles heureuses nopcesnoces !)
1615Puis il y met le feu : Or ainsi que brusloyentbrûlaient
La Là-dedans ces martyrs les MeresMères qui vouloyentvoulaient
Bien monstrermontrer que l’amour qu’à tous apprend nature
Ne pourrait estreêtre esteintéteint par une mort si dure
Toutes faisansfaisant chemin par où le feu se fend
1620PoulsentPoussent et jectentjettent hors chascunechacune leur enfant
« Le trop grand amour nuytnuit car les meresmères bruslantesbrûlantes
En pensant les sauver des flammes violentes
Pour une seule mort deux fois les font mourir
Là ce monstre escumantécumant encontr’encontreeux vient courir
1625Et à grands coups de pique et corps et bras leur perseperce
Et my-rostismi-rôtis sanglanssanglants dans le feu les renverse
Ainsi ce petit peuple et doux et tendrelet
Ce petit peuple helashélas petit peuple de lait
Par glaive et feu est mort chascunchacun sur les mammellesmamelles
1630Qui l’avoyentavaient allaité un petit pouls en elles
--- 33r ---
Dans la flambe apperceuaperçu monstroitmontrait leurs grands douleurs
Non point pour leur mort propre ains 253 pour celle des leurs
Leurs bouches et leurs bras qui dedans la fournaise
EmbrassoyentEmbrassaient leurs petits en gros charbons de braise
1635Elles ont veuvu changer puis tous leurs corps en feu
Aveques 254 leurs enfansenfants ont plus sentysenti que veu 255 . 256
LE Ch.Le choeur
PovresPauvres femmes pourquoypourquoi avez -vous estéété meresmères ?
N’ayant jamais conceuconçu vos morts seroyentseraient legiereslégères 257
Car vous n’eussiez point veusvu avec vous dans le feu
1640BruslerBrûler cruellement vos enfansenfants et neveux
NeNi vos enfansenfants neni vous ne feussiezfussiez morts ensemble.
P.Poulin
La mort de leurs maris à la leur ne ressemble
D’autant que ce brusleurbrûleur pour rechanger d’esbatébat
Fait dresser dans les prezprés double nouveau combat
1645Là contr’contreune moytiémoitié se tenanstenant (quelle danse) !
Ses vaillansvaillants chevaliers il fait courre la lançe
Et au sang de ceux -là enferrezenferrés à la fois
Du fer jusqu’à la main chascunchacun rougir son bois
L’autre moytiémoitié il fait (ô coeur plus dur que marbre !)
1650AttachezAttacher tous de rancrang chascunchacun à chascunchacun arbre
Du haut des meursmurs 258 les veoitvoit à jour ouvert perserpercer
Et sur leurs genoux morts les testestêtes renverser
Ils tirent contre oyez 259 cent mille harquebousadesarquebusades 260
Contre un blanc 261 de ChrestiensChrétiens ils font leurs grands bravades
1655Le plus presprès en est loin pour le moins de cent pas
Car leur mort sans languir plaisir ne donroit 262 pas
Au reste il fait dresser la dedans-dedans un trophée
Y engrave en airain non pas les vers d’Orphée
--- 33v ---
Ains 263 les actes cruels de sa grand cruauté
1660Qu’il veut perpetuerperpétuer à la posterité
Or Catderousse vient envoyé par Dopede
Catderousse qui tous à ce meschantméchant vous cedecède
Scavez Savez-vous quelles sont ses imprecationsimprécations
Ses despitsdépits maugreemensmaugréments et execrationsexécrations
1665«Ô furies d’Enfer ô infernales umbresombres
Ô tous malins esprits foudroyansfoudroyant les encombres
Ô phantosmesfantômes erranserrants avec rage et fureur
Ô vous Diables remplis d’une eternelleéternelle horreur
Ô par mes maudissons 264 je vous consacre et voue
1670Ce Peuple que je quitte et du tout desavouedésavoue
Pour le bien de d’Opede et de luylui et des siens
LuyLui renoncantrenonçant le droit de tous mes anciens
Et si ce n’est de coeur je vous pry 265 qu’à cestcette heure
Devant tous enragé par vos tourmenstourments je meure»
Le Ch.Le Choeur
1675Du cruel insensé la priereprière aura lieu 266
Et bien tostbientôt sentira sur soysoi la main de Dieu
Les diables l’empliront d’une mortelle crainte
Et frayeurs de tourmenstourments que sentira constrainte
Son ameâme miserablemisérable et à table mangeant
1680Bien tostBientôt il la rendra furieux enrageant 267
Le M.Le Maire
Que sa mort tousjourstoujours soit aux plus grands en memoiremémoire
Pour plus ne se dresser contre le RoyRoi de gloire
Le Ch.Le Choeur
Ces ChrestiensChrétiens sont heureux à qui Dieu fait ce bien
Que pour son nom et lozlos 268 la vie n’est plus rien
1685Ils ont souffert la mort pour sa sainte querelequerelle
Et il leur donne au ciel la couronne immortelle
--- 34r ---
D’un tel diademediadème il a le juste Abel sacré
Aussi feut fut-il pour luylui le premier massacré
DespuisDepuis tousjourstoujours SathanSatan des meschansméchants l’ire attise 269
1690Et contre JesuchristJésus-Christ et contre son EgliseÉglise
Combien feitfit Jezabel de prophetesprophètes meurtrir 270
Et combien de martyrs Antioche flestrirflétrir
EscorcherÉcorcher et bruslerbrûler par toute la Judée
Pour avoir saintement la LoyLoi de Dieu gardeegardée 271
1695Ne voulansvoulant rien cedercéder à cestecette vanité
Qui se mettoitmettait devant toute divinité
Si tostSitôt que JesuchristJésus-Christ est apparu sur terre
L’Ascalonite Herode à mort luylui fait la guerre
Et cuidant 272 le tuer il fait de mesmemême flanc
1700De mille enfansenfants meurtris sortir le laictlait et sang 273
DespuisDepuis tousjourstoujours le monde a redoublé sa rage
Contre tes saints ô Christ et contre eux plus enrage
Mais tout est pour ta gloire et tel est ton vouloir
Donne -nous donc pour toytoi de mourir le pouvoir
1705De Merindol le reste errant pour l’Evangile
Dans les monts et forestsforêts ne le laisse inutile
Mourir de faim Seigneur c’est ton troupeau chassé
Entre les loups receureçu des hommes pourchassé
Ton troupeau que dix jours la mortelle famine
1710Contraint de se nourrir d’escorceécorce et de racine
Où il en trouve il est du crudcru gland se paissant
Et est à ton vouloir du tout 274 acquiesantacquiesçant
Ton troupeau pour te rendre jusqu’à la mort hommage
De ta vertu reçoive invincible courage
1715Ton troupeau tant defaitdéfait qu’au -dedans de leurs corps
Et au travers l’on veoitvoit le jour comme dehors
Ne veux -tu regarder de ton oeil amiable 275
Ton peuple retranché ton peuple miserablemisérable
--- 34v ---
Las ! ce loup acharné le mettra tout à mort
1720Si ta main aujourdhuyaujourd’hui ne rompt tout son effort
Qu’encontre tous Tyrans en toytoi tant ils se fient
Qu’en nos cendres ton templ’temple un jour ils n’edifientédifient. 276
Catd.Catderousse
Fut -il donques 277 plaisir tel que de se venger
De ceux qui tenanstenant bon te faisoyentfaisaient enrager
1725Comme ce feu me plaistplaît Neron n’en eut telle joyejoie
Quand en Rome il voyoitvoyait derechef 278 bruslerbrûler TroyeTroie
Marchez Maire et Syndique pour accomplir mon voeu
Marchez pour estreêtre mis tout à cest’cette heure au feu
Et vostrevotre fils aussi ô captifs miserablesmisérables
1730Faites leur compaigniecompagnie innocensinnocents et coulpablescoupables
Venez -y volontiers que sert le reculer 279
Je vous vayvais faire ensemble à petit feu bruslerbrûler 280
Le M.Le Maire
La constance des morts la peur en hardiesse
Nous change et fait aller mourir en grand liesse 281
Catd.Catderousse
1735Le subjectsujet d’une loyloi autre que son Seigneur
D’estreêtre entre les vivansvivants ne doit avoir l’honneur
Le S.Le Syndique
Le fidelefidèle reçoit sa mort en patience
Pour ne devoir qu’à Dieu toute sa conscience
Le M.Le Maire
Mon cher fils mon enfant Dieu facefasse en nostrenotre mort
1740Que le meschantméchant cognoisseconnaisse en nos tourmenstourments son tort
Le Ch.Le Choeur
PerePère eterneléternel ô Dieu avec mesm’même essence
Est ton fils bien aimé ta seule sapience 282
--- 35r ---
Ton seul fils engendré de toytoi avant les cieux
Ton cher fils envoyé en ces terrestres lieux
1745Pour apporter la paix aux mondains incogneueinconnue 283
Et nous donner la foyfoi que les tiens ont tenue
Affranchis et sauvezsauvés par le sang de luylui seul
Du regnerègne de pechépéché et du mortel cercueil
Du lyonlion 284 rugissant de sa patte et sa gueule
1750Comme toytoi et ton fils n’est qu’une essence seule 285
PerePère tu es en luylui luylui en toytoi est aussi
Je pri’ 286 qu’il soit en nous qu’en luylui soyons aussi
A finAfin que sa vertu maintenant se parfaceparfasse
En nos InfirmitezInfirmités et nos pechezpéchés efface
1755Nous gardant à ce coup nostrenotre coeur de faillir
Puis ce combat fini vueillesveuille nous recueillir
Catd.Catderousse
Ah c’est trop babillé, marchez, tant de foyfoi dire !
Car quand le four est chauldchaud est -il pas temps de cuire
Le S.Le Syndique
Nous y allons Monsieur il ne faut tant debattredébattre
1760Contre le feu chascunchacun tout nudnu s’en va combattre
Catd.Catderousse
Comm’Commeils y courent droit ! Ils sont folsfous je le voyvois
Le M.Le Maire
La victoire mouransmourant nous aurons par la foyfoi
Le Ch.Le Choeur
Ô souverain seigneur ô grand Dieu des alarmes
Puis quePuisque tu as si chers nos soupirs et nos larmes
1765Que comm’commeen un vaisseau tu te les penspends au col
FayFais pour une Cabriere et pour un Merindol
NaistreNaître et fleurir tousjourstoujours mill’milleEglisesÉglises en France
Qui par ta vérité deschassentdéchassent l’ignorance
Des FrançoisFrançais trop seduitsséduits par l’AntechristAntéchrist Romain
--- 35v ---
1770Nous entrons en la flambe asseurezassurés sous ta main
D’estreêtre aujourd’huyaujourd’hui receusreçus en ta celestecéleste gloire
Si tosttôt qu’avons goustégoûté la coupe qu’il faut boire
Pour tousjourstoujours vivre heureux apresaprès ce court mourir 287
Catd.Catderousse
Entrez au feu pour veoirvoir s’il vous peut secourir
FIN
Référence à la traversée de la Mer Rouge, Genèse 14 :27-28 (CMM).