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La Trésorière
- Pré-édition
- Transcription, Modernisation, Annotation et Encodage : Jérémy Sagnier
- Relecture : Milène Mallevays
LA
TRÉSORIÈRETRESORIERE.
COMÉDIECOMEDIE PAR
JACQUESJAQUES GRÉVINGREVIN DE
Clermont-en-BeauvaisisCler-mont en Beauvaisis.
CETTECESTE COMÉDIECOMEDIE FUT FAICTE PAR LE COMMANDEMENT DU ROY HENRI II. POUR SERVIR AUX NOCESNOPCES DE MADAME CLAUDE DUCHESSE DE LORRAINE, MAIS POUR QUELQUES EMPÊCHEMENTSEMPESCHEMENS DIFFÉRÉEDIFFEREE ; : ET DEPUIS MISE EN JEU À PARIS AU COLLÈGECOLLEGE DE BEAUVAIS, APRÈSAPRES LA SATIRESATYRE QU’ON APPELLE COMMUNÉMENTCOMMUNEMENT LES VEAUX, LE 5V. DE FÉVRIERFEVRIER, 1558M. D. LVIII.
AVANT-JEU.
Non, ce n’est pas de nous qu’il fautfault
Pour accomplir cetcest échafaudeschaffault,
Attendre les farces prisées
Qu’on a toujourstousjours moralisées. :
5Car ce n’est notrenostre intention
De mêlermesler la religion
Dans le sujetsubject des choses feintesfeinctes.
Aussi jamais les lettres saintesSainctes
--- 48 ---Ne furent données de Dieu,
10Pour en faire aprèsapres quelque jeu.
Et puis tout’ ces farces badines
Me semblent êtreestre trop indignes
Pour êtreestre mises au devant
Des yeux d’un homme plus savantsçavant.
15CeluiCeluy donc qui voudravouldra complaire
Tant seulement au populaire,
CeluiCeluy choisira les erreurs
Des plus ignorantsignorans bâteleursbasteleurs. :
Il introduira la Nature,
20Le Genre HumainGenre-humain, l’Agriculture,
Un Tout, un Rien, et un ChacunChascun,
Le Faux ParlerFaux-parler, le Bruit CommunBruict-commun,
Et telles choses qu’ignorance
Jadis mêlamesla parmi la France.
25Que pourrons nous donc inventer
AfinÀ fin de chacunchascun contenter ?
QuoiQuoy ? le badinage inutile
Par qui quelquefois Martin-Ville
Se fitfeit écouterescouter de son temps ?
30QuoiQuoy ? demandez vous ces romansRomans
Jouer d’une aussi sotte grâcegrace,
Que sotte est cetteceste populace
De qui tous seuls ils sont prisésprisez, ?
Vous êtesestes bien mieux avisésavisez,
35Comme je croiscroy : votrevostre présencepresence
--- 49 ---MériteMerite avoir la jouissance
D’un discours qui soit mieux limé. :
Aussi avons-nous estimé,
Que la gentille PoésiePoësie
40VeutVeult une matièrematiere choisie
Digne d’êtreestre mise aux écritsescrits,
De ceux qui ont meilleurs esprits. :
Et non pour êtreestre ainsi souillée,
Ou en mille partspars détailléedetaillée
45Par ceux qui encor’ ne l’ont pas
Saluée du premier pas, :
Et qui pensent malgré Minerve
La retenir ainsi que serve,
Ou dans l’écolel’escole la lier
50Ainsi qu’un petit écolierescolier.
Non, non, ce n’est pas sa nature
Qu’elle s’en voise à l’aventureavanture
Vers celuiceluy qui la veutveult avoir.
Il fautfault premièrementpremierement savoirsçavoir
55Petit à petitPetit-à-petit sa pensée :
Car ell’ ne veutveult êtreestre forcée,
NiNy traitéetraictée, comme souvent
Nous l’avons vueveue auparavantau paravant
Au joug d’une plume marâtremarastre.
60N’attendez donc en ce théâtreTheatre
NiNe farce nine moralité, :
Mais seulement l’Antiquitéantiquite,
--- 50 ---Qui d’une face plus hardie
Se représenterepresente en comédieComedie. :
65Car onc je ne pourraipourroy penser,
Qu’aucun se voulut courroucer
Encontre nous, si pour mieux faire
Nous voulons aux doctes complaire.
Or sachezsçachez qu’en tout ce discours
70Nous représentonsrepresentons les amours
Et la finesse coutumièrecoustumiere
D’une gentille TrésorièreTresoriere,
Dont le métiermestier est découvertdescouvert
Non loinloing de la place Maubert.
75VraiVray est que le ProtonotaireProtenotaire,
Principal de tout’ cetteceste affaire,
Est de notrenostre université.
Mais j’aij’ay un peu trop arrêtéarresté,
Il vautvault mieux avec le silence
80Vous en donner la jouissance.
ACTE PREMIER
SCÈNESCENE I.
[Loys]
Eh bienEt bien Richard, quelle nouvelle
Apportes-tu de ma cruelleCruelle ?
VeutVeult-elle doncque êtreestre toujourstousjours
Ainsi peureusepaoureuse en ses amours ?
Richard.
85Monsieur, je croiscroy que la pauvrette
Sans aucun repos vous souhaitesouhaitte
Entre ses bras ; , voulez vous vo’mieux ?
Loys.
Je pense moimoy que tous les dieuxDieux
Prennent plaisir en mon martyremartire. :
90Incessamment mon mal empire,
Sans toutefoistoutesfois avoir cetcest heur
D’apaiserappaiser mon amour vainqueur.
Richard.
Non non, monsieur, j’aiay espéranceesperance
Que vous en aurez joüissance
95En peu de temps. : Laissez-moi moy faire,
C’est mon office, dont j’espèreespere
En faire si bien mon devoir.
Loys.
OuiOuy, mais toujourstousjours le vain espoir
Trompe ma trop grande constance
100Au milieu de mon impuissance.
Richard.
VraimentVrayment une telle beauté
A bien un amant méritémerité. :
--- 52 ---Et d’autant qu’êtesestes languissant,
D’autant quand serez joüissant
105Le plaisir sera désirabledesirable.
Loys.
Mais toujourstousjours pauvre misérablemiserable
Le jour je me mourraimourray cent fois
Pour son amour, et toutefoistoutesfois
DéjàDesja je prévoisprevoy que l’issueyssue
110Sera de quelque maigre vueveue.
Cela ne vient point que ma race
Ne fûtfust digne d’avoir la grâcegrace
D’une dame de plus hauthault lieu. :
C’est, c’est bien plutôtplustost quelque dieu
115Qui me cachaitcachoit dedans son sein
L’impuissance de mon dessein.
Richard.
Monsieur, je me tiendraistiendrois heureux
De mourir étantestant amoureux
D’une si parfaiteparfaicte beauté.
Loys.
120Richard, Richard, la cruauté
De cetcest archerotArcherot qui me domptedomte
Selon son fier désirdesir, surmonte
L’extrêmeextreme douleur de la mort.
Richard.
Nous sommes en cela d’accord. :
125Mais à cetteceste longue espéranceesperance
Opposez votrevostre joüissance.
Loys.
Encore, Richard, je t’assureasseure
Que tout le malheur que j’endure
--- 53 ---N’est rien, si tu peux faire tant
130Qu’en la parfin je sois content
Richard.
Ce n’est pas moimoy qu’il fautfault prier :
Il ne tient qu’à ce TrésorierTresorier.
Loys.
Le mari est-il avertiadverti ?
Richard.
Non non, mais il n’est pas parti
135Ainsi qu’elle pensaitpensoit.
Loys.
Comment ?
Richard.
Pour s’en aller faire un payment
En Languedoc. LuiLuy délogédeslogé,
VotreVostre malheur sera changé
En un perdurable plaisir :
140Car alors vous aurez loisir
De recouvrer le temps perdu.
Si avez longtempslong temps attendu,
Reprenez hardiment courage.
Loys.
Ha Richard, pourquoipourquoy davantage
145As-tu celé mon doux repos ?
Richard.
Il ne venaitvenoit pas à propos :
Encore votrevostre joiejoye augmente
De plus en plus par cetteceste attente.
Et si je m’en rapporte à vous,
150Si vous ne trouvez pas plus doux
Le plaisir, par le tardement,
--- 54 ---Que n’eussiez au commencement.
Loys.
VraimentVrayment Richard, pour ton devoir
Tu méritesmerites de recevoir
155D’un plus grand seigneur le loyer.
Richard.
Monsieur, il ne fautfault qu’employer
Richard, quand il est question
De conduire une faction :
« Aussi le serviteur doit faire,
160« Pour à son bon maîtremaistre complaire,
« Le devoir comme il appartient
« Jusques à la mort, s’il convient
« L’endurer pour l’amour de luiluy.
Loys.
Mais disdy, Richard, est-ce aujourd’huiaujourd'huy
165Que notrenostre TrésorierTresorier se part ?
Richard.
Penseriez-vous bien que Richard
Vous le dîtdist s’il n’étaitestoit ainsi ?
Vie, mettez moimoy tout souci
Sous le pied.
Loys.
Mais ce TrésorierTresorier
170Me doit encore mon quartier :
Il fautfault que tu sois diligent
De recouvrer tout cetcest argent
Avant qu’il parte : et qui plus est
Je luiluy payray son intérêtinterest,
175S’il veutveult faire du rigoureux :
Car à ces braves glorieux
--- 55 ---Il fautfault quitter une moitié
Pour avoir l’autre.
Richard.
L’amitié
VautVault bien cela, c’est pour l’usage
180De son ennuyeux cocuagecoquage.
Loys.
Va-t’en vers luiluy, voilàvoyla quittance :
Que s’il veutveult faire quelque avance,
Promets luiluy le vin hardiment.
Richard.
Je m’y en vaisvay,
Loys.
Pareillement
185FaisFay les recommandations
De mes journelles passions,
À ma demoiselledamoiselle et maîtressemaistresse :
Que si de ma longue détressedestresse
Elle aha quelque compassion,
190Qu’ell’ me donne assignation
Pour par un doux contentement
Mettre la fin à mon tourmenttorment.
Richard.
Mon maîtremaistre aha bien ce qu’il luiluy fautfault,
Encore qu’il ait le cœurcueur hault,
195Et qu’il ne veuille êtreestre domptédomté,
Si est-ce qu’il est surmonté
Par une femme aussi commune
Que les divers cours de la luneLune.
Elle peutpeult tant envers mon maîtremaistre,
200Que par babil ell’ l’a faitfaict êtreestre
--- 56 ---Un parangon de pauvreté :
Et sous l’ombre d’une beauté,
Qu’elle vend plus cher qu’au marché,
Elle luiluy a jàja arraché
205Les biens, l’honneur, et les amis :
C’est une mer, où il a mis
Mille trésorstresors qu’elle dévoredevore,
Sans les regorger : et encore
Qu’il luiluy donne tant qu’il voudravouldra,
210De rien plus il n’en adviendra.
À mon maîtremaistre qu’elle déçoitdeçoit,
NiNy à elle qui le reçoit.
Et cependantce pendant, mille langueurs,
Et milles amoureaux vainqueurs
215TourmentantTormentans son cœurcueur attisé́attizé.
Je pensaispensoy qu’il fûtfust plus rusé́ruzé,
VuVeu qu’il a tant hanté les armes,
Les courtisanscourtizans et les gens d’armesgensdarmes :
Mais les plus fins y sont trompéstrompez,
220Et les plus légerslegers attrapésattrapez,
Tant seulement sous l’apparenceapparance
D’une légèrelegere jouissance.
Encore si pour sa beauté
Elle valaitvaloit le décrottédecroté,
225Je diraisdirois : mais quoiquoy ? seulement
La façon de l’habillement
VautVault autant que la bague entièreentiere.
Eh bienEt bien, c’est une TrésorièreTresoriere,
Laquelle par son doux parler
230SaitSçait bien un bomme emmielleremmieler.
Mais par ma foifoy j’estime autant
--- 57 ---Ma Marion, et suis content
Encore plus de mes amours
Que non pas luiluy de son velours,
235Sans qu’il me la faille prier.
Mais n’est-ce pas mon TrésorierTresorier
Que je voisvoy venir droitdroict à moimoy ?
SCÈNESCENE II.
[LE TRÉSORIERTRESORIER]
Puisque c’est l’affaire du RoiRoy
Je ne diffèrediffere m’absenter,
240AfinÀ fin d’un chacunchascun contenter :
Le gain récompenserecompense le mal.
Qu’on fasseface seller mon cheval.
Richard.
Tant mieux, il est prêtprest de partir,
La dame pourra départirdepartir
245La jouissance de son corps,
Puisque monsieur s’en va dehors.
Le Tresorier.
Encor’ aiay-je quelque douleur
De laisser ma femme en sa fleur :
Car, las ! cetteceste tendre jeunesse
250Ne pourra porter la détressedestresse
De mon absence : et puis ces gens
Qui sont soigneux et diligentsdiligens
À tromper une creature,
Qui sera simple de nature.
255VraiVray, que je tienstien tant de ma femme,
Qu’avant me faire un cas infame
PlutôtPlustost endureraitendureroit la mort.
Richard
HélasHelas, jamais ne luiluy fitfeit tort,
Elle est de bonne parenté.
Le Tresorier.
260Pensez qu’un homme est tourmentetormente,
Depuis qu’il luiluy convient souvent
Aller à la pluiepluye et au vent,
DélaissantDelaissant avec le ménagemesnage
La femme en la fleur de son âgeaage.
Richard
265Le cœurcueur luy fautfault, la conscience
LuiLuy fait connaîtrecognoistre son offense.
Le Tresorier.
Il ne m’est rien plus agréableaggreable
Qu’avec ma femme désirabledesirable
Jouir du bien que Dieu me donne.
270Mais quoiquoy ? la pratiquepractique en est bonne :
Car je pourraipourray, si je suis sage,
PratiquerPractiquer en ce mien voyage
Trois mille francs en peu de jours.
Richard
Ce pendant comment les amours
275Se demerront, la demoiselledamoiselle
Ne sera du tout si rebelle
Qu’auparavant : car le loisir
LuiLuy fera mille fois choisir
Le bon moyen, l’heure et le temps
280Pour rendre ses amis contentscontens,
Tant le courtisancourtizan que son page.
Mais il fautfault faire mon message,
Craignant qu’en quelque coincoing de rue
--- 59 ---Je ne le perde de la vueveüe :
285Puis je pourraispourrois venir trop tard.
Dieu gard Monsieur.
Le Tresorier.
Eh bienEt bien Richard,
Comment va du seigneur Loys ?
Richard.
Il a toujourstousjours dix mille ennuys
Qui le tourmententtormentent, pour autant
290Qu’il n’aha pas son argent contant,
Et si ne voit qui en apporte.
Et qui pis est, jamais sa porte
N’est sans un marchand ennuyeux.
Qui se présentantpresentant à ses yeux
295Le menace pour son argent
De luiluy envoyer un sergent.
Le Tresorier.
Richard, par Dieu c’est comme moimoy,
Car maintenant je ne reçoisreçoy
À peine rien de mon office.
300Encore pour faire service
A quelques uns, toujourstousjours j’avance,
Et si ma foifoy, la récompenserecompense
Que j’en reçoisreçoy, n’est comme rien.
Richard
VertubieuVertu-bieu : je vous entendsenten bien,
305Le payment n’est encore prêtprest,
Nous demandons un intérêtinterest,
VoilàVoyla comment vous êtesestes doux.
Je suis venu par devers vous
Pour entendre tant seulement
--- 60 ---310Si mon maîtremaistre aura le payment
De son quartier que luiluy devez.
Le Tresorier.
Vous êtesestes fort mal arrivésarrivez,
Vous venez aprèsapres la bataille :
Je ne sachesçache pas une maille.
Richard
315Comment monsieur ? et cependantce pendant
Mon maîtremaistre sera attendant
VotreVostre retour ?
Le Tresorier.
Il le fautfault bien.
Richard
Mais, monsieur, pensez-vous combien
Ce luiluy est chose insupportable
320D’êtreestre si longtempslong temps redevable
À un tas de gens importuns.
Le Tresorier.
VraimentVrayment Richard, je saisscay aucuns
Qui m’ont voulu donner le quart
De leur payment.
Richard
Ma foifoy, Richard,
325N’aha point telle commission :
Pour donner une portion
De l’argent, il le fera bien.
Le Tresorier.
C’est bien parlé : viens çàviença, combien
VeutVeult-il donner pour l’intérêtinterest,
330S’il trouve son argent tout prêtprest ?
Quant est de moimoy, je ne l’aiay pas :
--- 61 ---Mais il n’y a que quatre pas
Jusqu’au logis d’un mien ami.
Richard
Le TrésorierTresorier n’est endormi,
335Se voyant en main la fortune
De pouvoir gagnergaigner la pécunepecune.
Le Tresorier.
Que dis-tu, Richard ?
Richard
Je songeaissongeois
En comptant ci-dessuscy dessus mes doigtsdoits,
Combien il voudraitvoudroit bien donner.
Le Tresorier.
340Je ne pourraipourroy plus séjournersejourner.
Richard
De trois cens livres vingt écusescus.
Le Tresorier.
Ha vraimentvrayment il méritemerite plus.
VoudraitVoudroit-il bien en donner trente ?
Richard
Pour vingt et cinq, qu’il se contente :
345Je vous feraiferay récompenserrecompenser,
Si voulez encor’ avancer.
Le Tresorier.
Je le veux à mêmemesme profit :
Aussi je voudraivoudroy qu’il me fitfeit
Quittance des paymentspaymens entiers
350Qu’il recevra des deux quartiers.
Richard
Vous les aurez.
Le Tresorier.
Mais il ne fautfault
Aussi m’en faire aucun défaultdefault,
Car je veux partir dans une heure :
Par quoiParquoy soyez en mon demeure
355Incontinent.
Richard
C’est bien assez.
Jamais ils ne seront lasséslassez
De prendre argent de toutes partspars :
Il n’est pas des pauvres soudardssouldars
Desquels ces braves TrésoriersTresoriers
360N’attirent toujourstousjours des deniers :
Mais au besoinbesoing il se fautfault taire.
SCÈNESCENE III.
[MARIE]
Dieu, monsieur le ProtonotaireProtenotaire
Est négligentnegligent en ses amours.
J’aiay vuveu le temps que tous les jours
365Il passaitpassoit devant la maison
Cinquante fois, mais la saison
Comme je croiscroy luiluy est venue,
Qu’il ne va plus parmi la rue :
Pensez qu’il est devenu sage.
Richard.
370Si je joue mon personnage,
Je sauraiscauray d’elle tout l’affaire
De ce jeune ProtonotaireProtenotaire.
Marie.
« Nous fuyons toujourstousjours notrenostre bien,
--- 63 ---« Jamais jamais à un bon chien
375« Ne tombera quelque bon os :
aprèsapres qu’ils ont tourné le dos,
Ils font leur meilleures risées
De celles qu’ils ont abusées.
Richard
Les plus rusésrusez y sont donc pris.
Marie.
380Quant ils ont l’amour entrepris
De quelque dame, à Dieu comment
S’ils en ont eu contentement.
Richard
Autant ailleurs c’est ma devise.
Marie.
VoilàVoyla MademoiselleMadamoiselle épriseesprise
385De l’amour d’un jeune écolierescolier,
Qui n’a le sousoul pour employer,
Et veutveult êtreestre aimé à créditcredit.
Richard
Ne l’avois-je donc pas bien ditdict ?
Marie.
Le seigneur Loys cependantce pendant
390Est à son amour prétendantpretendant,
Sans toutefoistoutesfois avoir cetcest heur
D’apaiserappaiser sa trop grande ardeur,
Si n’est de quelque vaine course :
LuiLuy qui aha plus d’écusescus en bourse
395Que l’autre n’aha pas de deniers.
« Mais voilàvoyla comment les derniers
« Seront toujourstousjours favorisésfavorisez,
« Et les plus fermes déprisésdesprisez.
Richard
J’entendsenten le nœudneud de la matièrematiere,
400Il se fautfault garder du derrièrederriere.
Marie.
VoiciVoyci Richard le serviteur
Du seigneur Loys, j’aiay grand’grand peur
Qu’il n’ait entendu ce qu’aiay ditdict,
Au pis, j’en feraiferay contreditcontredict :
405Mon Dieu, Richard, venez avant.
Richard
Que faites vous iciicy devant ?
Marie.
Rien, sinon que ma demoiselledamoiselle
VeutVeult parler à vous.
Richard
Que veutveult-elle ?
Marie.
Quant à moimoy, je ne le saissçay pas,
410Elle est jàja descendue en bas.
ACTE SECOND.
SCÈNESCENE I.
[LE PROTONOTAIREPROTENOTAIRE]
Hé ! Boniface mon ami,
Je suis déjàdesja mort à demi,
Tant ce petit dieu me tourmentetormente.
Ha ma trop cruelle Constante !
415La grand’ constance de ton fort,
Seule me causera la mort.
Boniface.
Comment cela, monsieur ? vous aiay-je
Si longtempslong temps servi au collègecollege,
Pour maintenant vous défier
420De votrevostre serviteur, premier
Qui en a mis les fers au feu ?
Le protonotaireprotenotaire.
HélasHelas, Boniface ! pour Dieu,
Si jamais la fidélitéfidelité
De ton devoir m’a incité
425À récompenserrecompenser ton service
Comme je doisdoy de mon office,
C’est ores qu’il te fautfault prévoirprevoir
Au mal instant du désespoirdesespoir,
Et montrermonstrer ton invention.
Boniface.
430Je saissçay bien qu’il n’est question
Que d’argent dont avez défaultdefault. :
« Car le temps est venu qu’il fautfault
« ToujoursTousjours avoir argent en banque,
« Qui veutveult que la dame ne manque.
Le protonotaireprotenotaire.
435Il est vraivray : car tout mon tourmenttorment
Vient de cela tant seulement.,
Tu saissçais que nous n’avons la croix,
EncoreEncores qu’il y ait trois mois
Avant que recevoir argent.
Boniface.
440Vous êtesestes par trop diligent
À faire la magnificence,
Depuis qu’avez la jouissance
--- 66 ---De quarante ou cinquante écusescuz.
Protenotaire.
Boniface, je ne suis plus
445Enfant comme je soulaissoulois êtreestre.
Boniface.
Il fautfault que vous soyez le maîtremaistre
DorénavantDoresnavant des passions
De vosvoz journelles actions.
Protenotaire.
Je le seraiseray. Mais pensespense-tu
450Combien est grande sa vertu,
Et combien sa perfection
PeutPeult dompter mon affection ?.
Boniface.
Nous voyons cela tous les jours :
Ce sont vosvoz premièrespremieres amours.
Protenotaire.
455Ce n’est point cela, Boniface. :
Tant seulement sa bonne grâcegrace,
Son doux parler et son maintien,
Sans rien flatterflater, méritentmeritent bien
L’amour d’un bien plus grand seigneur.
Boniface.
460VoilàVoyla, vous y avez le cœurcueur. :
Non pas vraimentvrayment que je déprisedesprise,
Disant cela, votrevostre entreprise ; :
Mais il ne fautfault êtreestre si chaud
En ses affaires.
Protenotaire.
Son cœurcueur hault
465MériteMerite un plus parfaitparfaict service.
Boniface.
Mais si l’argent du bénéficebenefice
Ne suffit à telle dépensedespense ?
Protenotaire.
Il fautfault aimer en espéranceesperance,
Il nous viendra quelque hasardhazard.
Boniface.
470OuiOuy bien, mais possible trop tard,
Il fautfault prévoirprevoir à son affaire.
Protenotaire.
Encore le bien de mon pèrepêre
Ne manquera point.
Boniface.
Il ne pense
Que nous fassionsfaçions si grand dépensedespense.
Protenotaire.
475Ha, je veux êtreestre entretenu
HonnêtementHonnestement du revenu
Qui m’appartient.
Boniface.
C’est la raison, :
Car vous êtesestes d’une maison
Qui le méritemerite ; : mais aussi
480Il fautfault avoir des siens souci.
Protenotaire.
Or, Boniface, il n’est pas heure
De faire plus longue demeure,
Nous avons métiermestier d’autre chose.
Boniface.
Je l’entendsenten.
Protenotaire.
Dont je me repose
485Du tout sur toitoy.
Boniface.
Je feraiferay tant,
Que nous aurons argent contant.
Protenotaire.
J’aimeayme mieux payer l’intérêtinterest,
PourvuPourveu que le payment soit prêtprest.
Boniface.
Je vous pri’pry’ laissez faire à moimoy.
Protenotaire.
490Aussi je m’en attens à toitoy.
Boniface.
Vous le pouvez ;, allez m’attendre
Dans le palais, j’iraiiray vous prendre
Au repasser.
Protenotaire.
Le SecrétaireSecretaire
M’y doit trouver pour quelque affaire.
SCÈNESCENE II.
[CONSTANTE]
495Richard, mon amiamy, ditesdictes-lui luy
Que j’en endure autant d’ennuiennuy
Qu’il m’est possible, et que j’espèreespere,
Mais qu’il soit parti, si bien faire
Qu’il sera content du devoir
500Que j’en feraiferay.
Boniface.
Il fautfault savoirsçavoir
Que veutveult ce doux contentement.
Richard.
Vous n’en voulez foifoy nine serment,
Mais il vous aime de tel cœurcueur,
Que déjàdesja son amour vainqueur
505L’a presque mis au désespoirdesespoir.
Constante.
Las, Richard, il aha tout pouvoir
Sur moimoy qui suis sienne, et j’espèreespere,
S’il me survient en mon affaire,
Le reconnaîtrerecognoistre tant que l’âmeame
510Me batte au corps.
Boniface.
La pauvre femme
Ne se donne qu’à ses amis. :
J’entendsenten bien tout, ell’ a commis
Quelque petite portion
De l’amoureuse affection
515Sur la boursebource d’un amoureux.
Richard.
Ma demoiselledamoiselle, il est heureux
De ce qu’il vous plaîtplaist demander
La chose qu’il peutpeult accorder.
Constante.
Eh bienEt bien, Richard, vous luiluy direz
520Que je suis sienne, et le prierezprirez
De ce dont je vous aiay parlé.
Boniface.
VoilàVoyla le pacquet emmalé,
--- 70 ---Mon maîtremaistre peutpeult bien dire adieuà Dieu.
Richard.
Je ne puis plus êtreestre en ce lieu,
525Je vaisvay quérirquerir l’autre quittancequictance.
Boniface.
Si est-ce que j’aiay espéranceesperance
D’émoucher quelque argent de vous.
Constante.
Hault, Boniface, un peu plus doux,
Quelqu’un vous fait-il desplaisir ?
Boniface.
530Il la fautfault avoir à loisir.
Ha, mademoiselleMa damoiselle Constante.
Constante.
Quel est l’ennuiennuy qui vous tourmentetormente ?
N’y sauroitsçauroit-on bien tôttost prévoirprevoir ?
Il est grand seigneur, qui peutpeult voir
535Monseigneur le ProtonotaireProtenotaire.
Boniface.
Il est empêchéempesché d’uneun affaire
Qui est de bien grand’importance,
En quoiquoy il a bonne espéranceesperance
De parvenir à grand honneur.
Constante.
540Eh bienEt bien bien, ce sera monsieur,
Il ne voudravouldra plus regarder
Ses amis.
Boniface.
Tant ell’ saitsçait farder
Et emmielleremmieler son langage !
Constante.
Bon Dieu, que vous êtesestes sauvage
545Depuis un peu !
Boniface.
C’est que je pense
À une bonne récompenserecompense
Qu’on donne pour son bénéficebenefice,
Si quelqu’unquelcun veutveult faire un service
De luiluy prêterprester deux cens écusescus.
Constante.
550Ne luiluy en faudraitfauldroit-il non plus ?
Boniface.
Non.
Constante.
N’aha-t-il-il point quelque amitié
Dedans Paris, pour la moitiémoytié ?
Boniface.
Non du tout, ouiouy bien pour cinquante.
Constante.
Ha, vraimentvrayment je suis très contentetrescontente
555De luiluy prêterprester le demeurantdemourant,
Du bon du cœurcueur, en m’assurantasseurant.
Boniface.
Ma demoiselledamoiselle, le plaifir
Sera selon votrevostre désirdesir
HonnêtementHonnestement récompensérecompensé.
Constante.
560À son vouloir.
Boniface.
J’aiay avancé
Ma langue, sans son mandement.
Constante.
Vous le pouvez honnêtementhonnestement. :
Car je suis si bien son amie,
Que s’il me demandaitdemandoit la vie
565Je luiluy départiraisdepartirois mon âmeame.
Boniface.
« Tant le bon vouloir d’une dame
« PeutPeult aider l’ami au besoinbesoing.
Constante.
Boniface, j’aiay plus de soinsoing
De l’avancement de son bien
570Et honneur, que non pas du mien,
Encore que j’en soissoy reprise. :
Mais je suis tellement épriseesprise
De son amour, que j’aiay grand peur
Que ce soit mon dernier malheur.
575Au pis aller, je suis heureuse
Que cetteceste étincelleestincelle amoureuse
A touché sa perfection.
Boniface.
Ce n’est qu’à bonne intention
Ma demoiselledamoiselle, et le tourmenttorment
580Se finira heureusement.
Constante.
Je priepry Dieu qu’il vous veuille ouïrouir.
Boniface.
Et alors vous pourrez jouir,
Vous savezsçavez quoiquoy.
Constante.
Ha ! Boniface.
Boniface.
MademoiselleMa damoiselle, votrevostre grâcegrace,
585Et votrevostre parfaiteparfaicte beauté
Seule vainquit sa liberté. :
Car plus il vit en ce martyre,
Tant plus constamment il aspire
À faire chose qui contente
590Le seul désirdesir de sa Constante.
Constante.
ÉcoutezEscoutez, je vous veux prier,
À cause que le TrésorierTresorier
S’apprêteappreste pour tantôttantost partir,
D’en vouloir Monsieur avertiradvertir,
595Qu’il soit un peu plus diligent. :
Et cependant, voilàvoyla l’argent ;,
Il m’en fera reconnaissancerecognoissance
Quand il viendra.
Boniface.
J’aiay espéranceesperance,
Qu’avant qu’il soit une bonne heure
600Il sera dans votrevostre demeure.
Vive, vive l’invention
Pour bien faire une faction. :
Il en fautfault bien faire la croix
En notrenostre âtre : ils sont tous de poix,
605Je les aiay eus tous pour le prixpris
Que cetteceste dame les a pris.
Je reconnaisrecognoy bien celui-cicestuy-ci,
Et ce double ducat aussi,
Un noble, un angelot encor :
610C’étaitestoit pour des braceletsbrasselets d’or
--- 74 ---Que monsieur luiluy donna un jour.
Ce demeurantdemourant vient de l’amour
Des bonnes gens de son quartier.
À tous les diables le métiermestier,
615Qui ne nourrit et entretient
Le compagnoncompaignon qui le maintient,
Et ne fûtfust qu’un peigne de buisbuys.
Constante.
Au moins si le seigneur Loys
Me fait ce bien, dont je le prie,
620Ma boursebource sera bien remplie
De l’argent que j’aiay déboursédebource.
SCÈNESCENE III.
[LE TRESORIER]
Croyez qu’un argent avancé
VautVault bien cela.
Sulpice
Si fait vraimentvrayment :
Et je m’ébahisesbahy fort comment
625Vous faitesfaictes si honnêtehonneste tour.
Le Tresorier.
Sire Sulpice, c’est l’amour,
Que je luiluy porte.
Sulpice
Il le vautvault bien.
Et puis de ces gens l’entretien
Sert de beaucoup aucunefois.
630Il me souvient qu’un jour j’étaisestois
--- 75 ---En la Courcourt pour un mien affaire,
Seulement un protonotaireprotenotaire
Auquel j’avois faitfaict du service
FitFeit tout mon cas.
Le TrésorierTresorier
Sire Sulpice,
635Comme vous ditesdictes, le maintien
De gens de courcourt, est notrenostre bien.
Je crains que nos fautesfaultes commises
À la parfin ne soientsoyent reprises,
Comme nous voyons la fortune
640ÊtreEstre plus souvent importune
À gens qui font en tel degré,
Qui n’ont toujourstousjours le vent à gré. :
Il ne faudraitfaudroit au mal extrême
Que ce bon gentilhomme mêmemesme
645Pour bien conduire mon affaire,
S’il m’advenaitadvenoit quelque misèremisere.
Sulpice
Vous ditesdictes bien, il fautfault prévoirprevoir
Au mal qui nous peutpeult décevoirdecevoir.
C’est ainsi qu’il fautfault disposer,
650C’est ainsi qu’il fautfault aviser
À un malheur qui se présentepresente
Pour brouiller toujourstousjours notrenostre attente,
Tant nature nous est cruelle.
Mais n’est-ce pas mademoiselleMa damoiselle
655Que je voisvoy venir droitdroict à nous ?
Constante.
Mon dieu, monsieur, dépêchez-dépeschez vous,
Vous savezsçavez qu’il est déjàdesja tard.
Le Tresorier.
Je n’attendsatten plus qu’aprèsapres Richard.
Constante.
HélasHelas mon Dieu ! la seule peur
660Qu’il ne vous advienneavienne un malheur
Me le faitfaict dire ;, tous les champs
Sont remplis de mauvaises gens. :
SurtoutSur tout gardez-vousgardez vous bien du soir.
Sulpice
Encor y faitfaict il bon prévoirprevoir,
665Cela ne vient que de bon cœurcueur.
Le Tresorier.
Si vous voyez le serviteur
Du seigneur Loys, que Marie
L’amèneamene aprèsapres nous.
Constante.
Je vous prie
De tôttost despecher votrevostre affaire.
SCÈNESCENE IVIIII.
MARIE
670L’homme de ce ProtonotaireProtenotaire
N’est pas des plus niaisniez du monde. :
Quand il est céansceans il me sonde,
Et semble bien à l’ouïrouyr dire
Qu’il ait intention de rire
675Tout ainsi comme faitfaict son maîtremaistre. :
Et croiscroy que s’il se sentoit êtreestre
Si peu que rien favorisé,
Il seraitseroit bien assez rusé
D’essayer s’il pourraitpourroit bien faire
--- 77 ---680Ce que faitfaict le ProtonotaireProtenotaire.
Je n’useraiuseray plus de rudesse
En son endroit, car ma maîtressemaistresse
DitDict qu’il ne fautfault point refuser
Ce qui ne se peutpeult onc user.
685« Aussi est-ce une grand’ folie
« Que d’engendrer mélancoliemelancholie.
« Nous n’aurons pas toujourstousjours le temps
« Pour rendre nos désirsdesirs contentscontans.
Il fautfault donc prendre le loisir,
690Puisque nous voyons le plaisir
S’offrir d’une gaîtégaité de cœurcueur.
Et pourquoipourquoy non ? le serviteur,
N’aura-t-il-il aussi grand’ puissance
De me donner la jouissance,
695Et rendre l’appétitappetit content
De ce point que l’on prise tant,
Comme Monsieur à sa Constante ?
Je croiscroy que le mal qui tourmente
L’esprit et mon repos de nuitnuict
700Se guéritguerist par mêmemesme déduitdeduict. :
Autant peutpeult le lailay que le prêtreprestre,
Et le serviteur que le maîtremaistre,
Le pauvre, comme un de grand’ race.,
Mais je ne voisvoy point Boniface
705Venir ainsi qu’il a promis.
ACTE TROISIEME.
SCÈNESCENE I.
LOYS
« Aujourd’huiAujourd'huy l’on n’aha plus d’amis
« Si n’est la boursebource et les écusescus.,
« Aujourd’huiAujourd'huy l’on ne trouve plus
« Qui veuille tenir la querelle
710« De quelque honnêtehonneste demoiselledamoiselle.
« Le gain faitfaict tout, le gain emporte
« Les rempartsrampars d’une ville forte ; :
« Le gain fait cocuscoqus les maris ; :
« Le gain est le dieu de Paris,
715« C’est le dieu des inventions,
« Et la fin des intentions.
« Le gain faitfaict courir les marchans
« Aux périlsperils et dangers des champs,
« Au périlperil des ventsvens et tempêtestempestes,
720« Qui plus souvent dessus leurs têtestestes
« TombantTombans d’épouvantable effort,
« Leur mettent dans les dentsdens la mort,
« VoireVoyre au plus beau de leur jeunesse.
Encore qu’il soit tel, si est-ce
725Que jamais il n’eut la puissance
De faire fléchirflechir la constance
De ma cruelleCruelle. De son cœurcueur
Amour en futfeut le seul vainqueur. :
Tant seulement d’une beauté
730Son cœurcueur se sentit incité. :
Il repose aussi en un lieu
Digne du triomphe d’un dieu.
--- 79 ---Qu’un dieu tout seul aussi se vante
D’avoir faitfaict broncher ma Constante,
735Elle seule dessous le Ciel
Qui méritemerite avoir l’honneur tel.
L’amour qui le commun enflamme
N’est que neige au prixpris de ma flamme,
D’autant que sa divinité
740Surpasse toute humanité
Au brasier qu’il m’a faitfaict sentir.
SCÈNESCENE II.
[RICHARD]
Monsieur, il est prêtprest à partir,
Et ne reste plus que quittancequictance
Pour votrevostre dettedebte et pour l’avance ; :
745Car l’argent est déjàdesja tout prêtprest.
Loys.
Combien prent-il pour l’intérêtinterest ?
Richard.
Vingt-cinq écusescus sur le payment,
Et autant sur l’avancement.
Loys.
C’est trop vraimentvrayment de la moitié.
Richard.
750Encor’ si n’étaitestoit l’amitié
D’un sien voisin, il ne pourraitpourroit
Vous en bailler.
Loys.
Et ce seraitseroit
Un tour duquel la repentance
Suivroit de bien prèspres la vengeance.
755Retiendroit-il ainsi mon bien ?
Richard.
Monsieur, encor’ ny prend-ilprend il rien.,
C’est un marchandmarchant, comme j’aiay ditdict.
Loys.
Pardieu, il a pauvre créditcredit
À ce prêteurpresteur.
Richard.
VoilàVoyla que c’estcest :
760« Les amis sont à intérêtinterest,
Encore se fautfault-il hâterhaster.
Loys.
Or puis qu’il en fautfault échappereschapper,
VoilàVoyla l’autre quittancequictance encor’.
Richard.
C’est mon, mais de la chaînechaine d’or
765Que demande la demoiselledamoiselle ?,
Loys.
Je n’en sachesçache point d’assez belle. :
DélivreDelivre luiluy cinquante écusescus
Pour en acheter une, ou plus
S’il est métiermestier ;, la récompenserecompense
770Que je prétendspretends, vautvault la dépensedespence. :
Au demeurant hâtehaste le pas.
Richard.
Les escadrons et les combatscombas
N’eurent oncquesoncque si grand’ puissance
Que Monsieur n’y fitfeit résistanceresistance. :
775Et maintenant une beauté
Triomphe de sa liberté.
Encor’ vraiment la Damoiselle,
Quant tout est ditdict, n’est pas si belle. :
--- 81 ---ToutefoisToutesfois je ne la déprisedeprise. :
780« Car on ditdict que la marchandise
« Qui plaîtplaist est à demidemy vendue.
Je crainscrain que ma voix entendue
Ne soit entrée en la cervelle
De cetteceste rapporte-nouvelle,
785Qui m’attend là devant la porte. :
Car vraimentvrayment elle est assez sotte
Pour le rapporter à Constante.
SCÈNESCENE III.
[MARIE]
VoiciVoyci Richard qui se tourmente
De quelque malheur advenu.
790Son esprit est bien détenudetenu,
À voir sa manièremaniere de faire.
Richard.
Il fautfault penser à mon affaire,
Puisque j’approcheaproche la maison.
Marie.
Venez Richard, c’est la raison
795Que si longtempslong temps on vous attende.
Richard.
Eh bienEt bien, quoiquoy petite friande ?
Vous serez donc toujourstousjours fâcheusefascheuse ?,
Vous ferez donc la rigoureuse
Au pauvre Richard langoureux ?.
800Mon Dieu, que je seraisserois heureux,
Si je pouvaispouvois à mon loisir
Avoir de ce sein le plaisir. :
Ces deux ivoirines boulettes,
--- 82 ---Ces deux cerises rondelettes.
805Ce sera bien quand vous voudrez.
Marie.
LâchezLaschez vosvoz chiens, vous les prendrez. :
Car vous êtesestes le nonpareilnompareil.
Richard.
Si vous êtesestes de mon conseil,
Nous ferons bien nosnoz besognettesbesongnettes.
Marie.
810EhEt mon Dieu, Richard, que vous êtesestes
Ores éveilléesveillé pour votrevostre âgeaage.
Richard.
Ce n’est sinon que le courage,
Qui s’augmente de jour en jour.
Marie.
Vous voulez donc faire l’amour ?.
Richard.
815Ma foifoy, Richard se délibèredelibere
Avoir toujourstousjours pour l’ordinaire
Quelque chose qui soit de mise.
Marie.
VoilàVoyla une belle entreprise.
Richard.
Il m’y fautfault or’ avant prévoir.
Marie.
820Comment ? il sembleraitsembleroit à voirveoir
Que vous ne sussiezsceussiez troubler l’eau.
Richard.
L’intention est au cerveau,
« Marie, et puis il ne fautfault pas
« Estimer le moinemoyne à son pas
825« Quand il marche dans le couventconvent.
Marie.
Ananda, vous êtesestes savantsçavant,
Vous entendez bien cet affaire.
Richard.
Je suis niaisniez, laissez moimoy faire ;,
Aussi bien n’engendré-je point.
Marie.
830Richard, Richard, j’entendsenten le pointpoinct.
Vous voulez rire, c’est cela.
Richard.
Ma foifoy, me voicivoyci, me voilàvoila.,
Je ne tiens jamais mon courroux,
Je suis humain, courtois et doux,
835PrêtPrest à vous faire tout service,
À celle fin que je jouisse…,
Vous entendez le demeurant.
Marie.
Sus, sus, Richard : marchez avant. :
Monsieur le TrésorierTresorier attend
840Pour vous donner argent comptantcontent. :
Il est chez le sire Sulpice.
Richard.
« Prendre argent est un bon office,
« Et mauvais d’êtreestre fournisseur.
Marie.
Vous êtesestes un beau gaudisseur.,
845Ananda, je m’y recommande.
Richard.
Adieu,À dieu la petite friande.
Marie.
Il veutveult ressemblerresembler Boniface.
SCÈNESCENE IVIIII.
[CONSTANTE]
Viens çà,Viença méchantemeschante, quand sera-ce
Que feras ce qu’il appartient ?
850Dy.
Marie
Ce n’est pas à moimoy qu’il tient.
Constante
Que jasesjaze-tu en cetteceste place ?
Marie.
Que voulez vous si Boniface
Ne se veutveult d’aventureavanture hâterhaster ?
Constante.
Qu’as tu à faire d’arrêterarrester
855Le valet du seigneur Loys,
À babiller devant cetcest huishuys
Avec luiluy ? : vous sentez le cœurcueur. :
Encor’ avec un serviteur.
SaintSainct Jean, le bon ami de Dieu,
860Vous irez en un autre lieu
Faire votrevostre belle menée.
Comment, madame l’affétéeaffetée,
Ect-ce l’étatestat que je vous montremonstre ?
Croyez que, si je vous rencontre,
865Vous maudirez à jamais l’heure
D’avoir entré en mon demeure.
Marchez, marchez, entrez dedans.
VoilàVoyla, c’est l’amour de ce temps.,
« Aujourd’huiAujourd'huy l’on ne voit plus homme
870« Garder la fidélitéfidelité, comme
« Les amoureux du temps passe.
--- 85 ---Le ferme amour est déchassé,
Et en son lieu une feintise,
Le seul masque, a sa place prise.
875Nous , cependant,ce pendant mal avisées,
Sommes plus souvent abusées
Par ceux qui ne font que chercher
Le moyen de nous débaucher.
« Et voilàvoyla comment aujourd’huiaujourd'huy
880« La fin d’amour n’est rien qu’ennuiennuy. :
Car des hommes l’outrecuidance
Est cause de cetteceste inconstance. :
Eux qui tireraienttireroient d’une femme
Les biens, l’honneur, le corps et l’âmeame… :
885Et puis quand ils ont faitfaict, adieuà Dieu,
Tout autant en un autre lieu,
Ainsi que fortune leur donne. :
Mais en vain je me passionne.
SCÈNESCENE V.
[LE PROTONOTAIREPROTENOTAIRE]
Ma Constante se plaintplainct de moimoy,
890Et m’accuse, comme je croiscroy,
De ce que je demeure tant
À venir.
Constante.
Ah ! trop inconstant !
Et moimoy trop facilefacille à le croire.
Je pensaispensoy le ProtonotaireProtenotaire
895ÊtreEstre digne d’un plus grand heur. :
Mais je croiscroy que son serviteur
--- 86 ---A pris sur luiluy plus de puissance
Qu’il ne fitfeit onc d’obéissanceobeissance.
Protenotaire.
Ha, Boniface ! maintenant
900J’aperçoisaperçoy que tout ce tourment
Ne luiluy vient sinon que de moimoy.
Constante.
L’amour donc n’aura plus de loiloy ?
On n’en fera donc plus de compte ?
Protenotaire.
L’impatience me surmonte,
905Je n’en sauraissçaurois plus endurer.
Constante.
Encor’ qui me faitfaict espéreresperer,
C’est la mort aprèsapres longue attente.
Protenotaire.
Las ! que pensez-vouspensez vous, ma Constante,
En vous menaçantmenassant du trépastrespas ?
Boniface.
910Le voilàvoyla pris, il a son cas,
La dame le tient à son aise.
Constante.
Hélas,Helas monsieur, ne vous déplaisedesplaise,
Je vous pensaispensoys êtreestre plus loinloing.
Protenotaire.
Comment, mon cœurcueur ? comment, mon soinsoing ?
915Penseriez-vousPenseriez vous bien qu’en amour
Je voulussevoulsisse faire un tel tour ?
Vous n’avez expérimentéexperimenté
Quel vouloir aha ma fermeté ;,
Encor’ vous n’avez assuranceasseurance
--- 87 ---920Quelle est en amour ma constance.
Boniface.
Il en a tout au long du bras.
Constante.
Pardonnez-moi, moy mon seul soulas,
« L’amour est toujourstousjours soupçonneuxsoubçonneux. :
Boniface.
C’est l’ordinaire entre amoureux,
925Qui faitfaict que la foifoy se renforce. :
« Car c’est d’amour amorceamorse
« Que les débatsdebats de deux amans.
Protenotaire.
La mort puisse mes jeunes ans
PlutôtPlustost retrancher en ma fleur,
930Que je soissoy jamais serviteur
D’une autre dame que de vous.
Jamais l’amour ne me soit doux,
Si par mon infidélitéinfidelité
Je sers à une autre beauté.
935PlutôtPlustost me laisse tout amiamy,
Et plutôtplustost me soit ennemi
L’aspect de mon astre fatal.
Boniface.
Il est au plus fort de son mal.
« Il n’y a rien dessousdessoubz les cieux
940« Ou pire, ou plus audacieux.
Constante.
Aussi vous savezsçavez , monseigneur,
Que mon corps et tout mon honneur
Vous fut abandonné par moimoy
Sur l’assuranceasseurance de la foifoy,
--- 88 ---945Comme seul digne d’êtreestre aimé.
Protenotaire.
Aussi toujourstousjours aiay-je estimé
Mon heur favorisé des dieux,
Comme celuiceluy seul sous les cieux,
Qui est heureux en ses amours.
Boniface.
950C’est la coutumecoustume, on voit toujourstousjours
Ces jeunes gens à marier
Devenir fousfols.
Protenotaire.
Le TrésorierTresorier
A-t-ilA-il déjàdesja gagnégaigné le hauthault ?
Constante.
Non pas encore, mais il fautfault
955Entrer céansceans, et vous cacher. :
Encor fautfault-il se dépêcherdépescher,
Car il n’est pas loinloing.
Protenotaire.
Mais comment,
S’il demeuraitdemouroit plus longuement ?
Constante.
Il est sur le pointpoinct de partir.
SCÈNESCENE VI.
[RICHARD]
960Par le corps, j’en veux avertiradvertir
Mon maîtremaistre, il le saurasçaura. : Comment ?
Est-ce là donc le beau serment
De loyauté ? Je m’en doutaisdoubtois,
J’en suis certain à cetteceste fois, :
--- 89 ---965Car de mes deux yeux je l’aiay vuveu.
Constante.
Eh bienEt bien, Richard, avez vous eu
VotreVostre payment ?
Richard.
Une moitié.
Constante.
Mon don n’est-il point oublié ?
Richard.
VoiciVoicy l’argent pour en avoir,
970Si vous voulez le recevoir.
Constante.
Pourquoy non ?
Richard.
Ouvrez votrevostre main.
Constante.
Ha, Richard, ce seraitseroit en vain,
Je vous pri',pry' ne me trompez plus.
Richard.
Non non, voilàvoyla cinquante écusescus
975Pour avoir une chaînechaine d’or.,
Me pensez vous moqueurmocqueur ?
Constante.
Encor’
Vous avez de moimoy souvenance. :
VoilàVoyla pour votrevostre récompenserecompense.
Richard.
Il m’a commandé de savoirsçavoir
980Quand il pourraitpourroit vous venir voir.
Constante.
Non pas pour aujourd’huiaujourd'huy– , demain.
Richard.
Touchez en donc dedans ma main.
Constante.
Je le veux, je me recommande.
Richard.
Par le corps bieu, ell’ ne demande
985Que les écusescuz ; : car quant au reste,
Ell’ aha son cas. M, mais je proteste
D’en avoir bientôtbientost la vengeance – ,
Et du payment, et de l’avance,
Et des cinquante écusescuz encor’,
990Des anneaux et des chaîneschaines d’or
Dont Monsieur luiluy a faitfaict présentpresent.
Ell’ n’aha rien trop chaudchauld nine pesant.
Et voilàvoyla, la coutumecoustume est telle ; :
Car envers une demoiselledamoiselle
995Il fautfault toujourstousjours l’argent en main. :
Et puis on saitsçait bien que son gain
Est semblable à l’oiselerie. :
L’oiseleur en quelque prairie
Vient épandreespandre ses grains seméssemez,
1000Où les oiseaux accoutumésacoustumez
Ainsi se laissent amorcer :
« (Car il fautfault un peu avancer,
« Pour en avoir du gain aprèsapres).
Et lorsqu’ilslors qu’ils sont pris dans les retsretz,
1005Ils payent au long la dépensedespense,
Dont l’oiseleur a faitfaict l’avance.
Ainsi, le bordelbordeau c’est le pré
Là ou l’amoureux est entré
Comme un oiseau ;: la maquerellemacquerelle
--- 91 ---1010Est l’oiseleur, qui renouvelle
Souvent l’appâtappas, et met en main
Au lieu d’amorce, une putain ; :
Les caresses, les mignardises,
Les bonjoursbon-jours et les gaillardises,
1015Le doux acueil, le deviser,
Sont les moyens d’apprivoiseraprivoiser.
Et en cetteceste façon, mon maîtremaistre
Est aux rets. M : mais si je puis êtreestre
ÉcoutéEscouté, il aura vengeance
1020De toute cetteceste grand’ dépensedespense.
Encore ce beau TrésorierTresorier,
Et ce cocucoqu, se fait prier,
Où il est le plus diligent. :
Et fait accroireacroire que l’argent
1025Qu’il m’a baillé n’est pas à luiluy.
Je luiluy feraiferay dire aujourd’huiaujourd'huy
CeluiCeluy qui a mangé le lard,
Si je le puis tenir à part.
ACTE QUATRIÈMEQUATRIEME
SCÈNESCENE I.
[LOYS]
Amour premier de notrenostre vie
1030Inventa la bourellerie,
Et cruauté, comme je croiscroy. :
Car assez en moimoy j’aperçoisj’apperçoy
Combien sa rage est redoutable,
MoiMoy qui suis le plus misérablemiserable
1035Qui soit en ce monde vivant.
--- 92 ---Je suis ébranlé comme au vent,
Je suis épointespoind et tourmentetormente,
Demi-mort, rompu, transporté,
Tourné dans la roüe d'amour. :
1040En mon esprit ne fait séjoursejour
Aucun repos, je suis jàja las,
Là je suis ou je ne suis pas,
Mon esprit n’est là ou je suis,
Je veux cela que je ne puis. :
1045Vivant et mourant je demeure. :
Ce qui me plaîtplaist en la mêmemesme heure
Me tourne en mécontentementmescontentement,
Tant déjàdesja l’amoureux tourmenttorment
S’est acquis sur moimoy de puissance. :
1050Il me met en routeroutte, il m’élance,
Il désiredesire, il ravit, il tient,
Ce qu’il me donne, il le retient. :
Il me fait à l’instant défairedeffaire
Ce que lui-mêmeluymesme m’a faitfaict faire,
1055Et l’œuvre faitefaicte à sa poursuitepoursuitte
Est tout incontinent détruitedestruitte.
Et encor’ avec ces malheurs,
Ce seul pointpoinct-ci cy fait que je meurs.
Richard.
Richard.
Monsieur.
Loys.
SeCe peutpeult-il faire,
1060Que ce gentil ProtonotaireProtenotaire
Soit jouissant de mon méritemerite ?
Richard.
Je vous aiay l’affaire décritedescrite,
HormisHors mis le sautsault tant seulement.
N’est-ce donc pas assez ?
Loys.
Comment ?
Richard.
1065Demandez-vousDemandez vous comment j’aiay susceu
Ce beau chef-d’œuvre ? je l’aiay vuveu
De mes deux yeux. E : et davantaged’avantage,
J’aiay entendu tout leur langage,
Et la conduiteconduitte de l’affaire.
Loys.
1070Mais qui est ce ProtonotaireProtenotaire ?
Le pourras-tupourras tu bien reconnaîtrerecognoistre ?
Richard.
Ha, je voisvoy bien que c’est, mon maîtremaistre
Ne croira Dieu que sur bon gage.
Loys.
Je perds le sens et le courage
1075Tant ce dur rapport me tourmentetormente.
Qui eûteust pensé que ma Constante
M’eûteut voulu faillir en amour,
Et me faire un si lâchelache tour ?
Encore ne le puis-je croire.
1080As-tu vuveu ce ProtonotaireProtenotaire
Entrer dedans ?
Richard.
OuiOuy, je l’aiay vuveu.
Loys.
As-tu vuveu qu’elle l’a reçureceu ?
Richard.
J’aiay vuveu mêmemesme qu’ell’ le baisaitbaisoit,
Et le flattantflatant le courtisaitcourtisoit.
Loys.
1085Tout cela n’est que courtoisie,
Je ne prendspren point de fantasie
Pour un baiser ; : car, maintenant,
Cela se fait honnêtementhonnestement.
Richard.
Mais quand avecque ce baiser
1090On ajouteadjouste le deviser,
Qui montremonstre assez l’affection
De l’amoureuse passion,
Je croiscroy qu’il ne fautfault plus de doute.
Loys.
Est-ce ainsi donc qu’ell’ me redoute ?
1095SeraiSeray-je donc si peu prisé ?
Richard.
Elle vous a dévalisédevalisé.
Loys.
Encore ne le croiscroy-je point.
Raconte moimoy de pointpoinct en pointpoinct
Comment le tout s’estc’est démenédemené,
Richard.
1100J’étaisestois en un lieu détournédetourné
Où j’aiay entendu tout l’affaire.
Loys.
Je suis donc contraintcontrainct de le croire. :
Tu ne voudraisvoudrois êtreestre menteur.
Richard.
Je n’en suis que le serviteur,
--- 95 ---1105Et pour le devoir de service
Je fais au moins mal mon office
Qu’il m’est possible. Au demeurant,demourant
ToujoursTousjours véritableveritable, espérantesperant
Faire toujourstousjours de mieux en mieux.
Loys.
1110L’eau, la terre, l’air, et les cieux,
Et mille autres fureurs éprisesesprises
Contrarient mes entreprises.
Mais je veux montrermonstrer combien peutpeult
Mon ire depuis qu’ell’ s’émeutesmeut.
Richard.
1115« CeluiCeluy qui voudravouldra s’empêcherempescher,
« Qu’il entreprenne êtreestre nocher,
« Pour dessus la grand’ mer conduire
« Par son conseil une navire
« Et une femme. C : car au monde,
1120« Il n’y a rien qui plus abonde
« En toutes affaires nouvelles
« Que les nefs et les demoisellesdamoiselles.
Et pourtant si mon maîtremaistre est sage,
Qu’il ne s’en fâche davantaged’avantage.
1125Puis j’aiay entendu bien souvent,
Que d’une femme le devant,
Ressemble cetteceste lampe ardante,
Qui est dans l’égliseEglise pendante,
AfinÀ fin d’alumer les chandelles
1130De tout’ les offrandes nouvelles ; :
Elle en allumealume infinité
Sans perdre rien de sa clarté. :
Aussi la femme a beau changer
--- 96 ---Un familier à l’étrangerestranger,
1135L’étrangerestranger au premier venu,
ToujoursTousjours son cas est maintenu
En son entier, si d’aventure
Elle n’y mêlemesle quelque ordure.
Et si dit-on communément,
1140Qu’aprèsapres le doux ébatementesbatement
Du jeu d’amour, il n’y perdpert plus,
Le tablier rabaissé dessus.
SCENE II.
[LE TRESORIER]
Sire Sulpice, j’aiay vouloir
De vous le faire apercevoir.
Sulpice
1145Vous me faitesfaictes par trop d’honneur.
Le Tresorier.
Vous trouverez un serviteur,
Et un ami en mon endroit.
Sulpice
Non non, monsieur, quand il faudraitfauldroit
MontrerMonstrer la bonne affection,
1150Vous sauriezsçauriez quelle intention
J’aiay de vous faire du service.
Le Tresorier.
Je le saissçay bien, sire Sulpice,
Ce n’est d’aujourd’huiaujourd'huy seulement. :
Et je vous promets le serment,
1155Que tant que Dieu me donne vie
J’auraiauray toujourstousjours pareille envie. :
Je vous connaiscognoy digne d’aimer.
Sulpice
Autant devez-vousdevez vous estimer
De ma part.
SCÈNESCENE III.
[LOYS]
Çà çàCa ca̧, tous en armes.
Richard.
1160Ils ont affaire à des gens d’armesgendarmes,
Ils le connaîtrontcognoistront par effeteffect.
Thomas
Monsieur, ce ne seraitseroit mal faitfaict
De prendre en main quelque rondelle.
Loys.
Non non, je n’aiay que faire d’elle,
1165Elle pense donc que je prise
Davantage sa marchandise
Que mon honneur. J : je ne suis plus
De ceux qui donnent des écusescuz
Pour m’entretenir en sa grâcegrace. :
1170Je suis d’une trop noble race.
Thomas
Je veux faire provision
Maintenant d’un bon morion, :,
Pour couvrir le hauthault de ma têteteste.
Loys.
Me penserait-ellepenseroit elle tant bêtebeste,
1175Que voulussevoulsisse endurer tel tort ?
Le Tresorier.
Sire Sulpice, quel effort !
--- 98 ---Que veutveult dire cetteceste entreprise ?
Sulpice
Possible quelque noise épriseesprise
Entre eux ; : car toujourstousjours ces soudardssouldars
1180Ont querelles en toutes partspars.
Le Tresorier.
Entrons dedans.
Sulpice
Fermez votrevostre huishuys.
Le Tresorier.
Je connaiscognoy le seigneur Loys,
Je croiscroy qu’il ne me cherche pas.
Richard.
Monsieur, monsieur, hâtonshastons le pas,
1185Le TrésorierTresorier est à la porte.
Loys.
Çà, çàÇa çà faitesfaictes-moi moy bonne escorte,
Qu’on me luiluy fende les naseaux.
Richard.
Je veux comme des bécasseauxbecasseaux
Enfiler cetteceste TrésorièreTresoriere,
1190Le TrésorierTresorier, la chambrièrechambriere,
Pour marquemerque qu’une telle injure
N’est impunie.
Thomas
Et moimoy je jure,
Que le premier par moimoy trouvé
DemeureraDemourera sur le pavé,
1195ProtonotaireProtenotaire, et Boniface.
Le Tresorier.
Sire Sulpice, il nous menacemenasse.
--- 99 ---HélasHelas mon dieu ! je suis perdu.
Thomas
Le TrésorierTresorier m’a entendu,
Il heurte pour entrer dedans.
Sulpice
1200Ils sont armésarmez jusques aux dentsdens,
Et si chacunchascun son bâtonbaston porte.
Le Tresorier.
Ne veutveult-on point ouvrir la porte ?
Me laisserez-vouslaisserez vous massacrer ?
Thomas
Il est en grand peine d’entrer ;,
1205Poussons dedans, armet en têteteste.
Loys.
Sus, que chacunchascun de vous s’apprêteapreste
De faire maintenant devoir.
Richard.
Je luiluy feraiferay bien à savoirsçavoir
À ce gentil ProtonotaireProtenotaire,
1210Qu’il n’a pas maintenant affaire
À un pédantepedante de collègecollege.
Thomas
Il est pris, il s’est mis au piègepiege.
Loys.
Sus, sus dedans, enfoncez l’huishuys.
Richard.
Il me semble à voir que je suis
1215À l’assautassault de quelque rampart.
Enfonçons l’huis de part en part ;,
Nous sommes sur nosnoz ennemis.
SCÈNESCENE IVIIII.
MARIE
Miséricorde !Misericorde mes amis,
Sommes-nousSommes nous en une province
1220Où l’on ne craigne point le Prince ?
Hélas,Helas mon dieu ! quelle frayeurfraieur !
Encore qui plus est, Monsieur
A trouvé ce ProtonotaireProtenotaire,
Qui n’a susceu autre chose faire,
1225Sinon que, se pensant sauver,
Et voyant subit arriver
Le courtisan et ses soudardssouldars,
Qui le cherchaientcherchoient de toutes partspars,
Il s’est rendu à leur mercimercy.
1230ÔO quel ennuiennuy, ô quel soucisoucy,
Quelle lamentable journée
Maintenant nous est ordonnée !.
VoilàVoyla, jamais nous n’aurons bien
Dans le logis ;. car aussi bien
1235ToujoursTousjours le TrésorierTresorier jaloux
Nous acravantera de coups. :
Jamais il n’aura mercimercy d’elle.,
Encore si ma Damoiselle
N’eûteut étéesté prise en ce délitdelict
1240Auec monsieur dessus le litlict,
L’on eûteust peu couvrir cet’ affaire. :
Mais comment ? le ProtonotaireProtenotaire
La tenaittenoit déjàdesja embrassée,
Quant le mari l'ala devancée
1245Comme elle se pensaitpensoit cacher,
--- 101 ---Et si ne la pouvoit lâcherlacher. :
Ce qui aà tant seulement faitfaict
Qu’il les aà pris dessus le faitfaict.
Je m’ébahisesbahis bien fort comment
1250Il n’est venu premièrementpremierement,
À Boniface. Toutefois : toutesfois
J’en suis échappéeeschappée.
SCÈNESCENE V.
[BONIFACE]
J’étaisestois
Pour mon profit particulier,
Quant j’aiay ouïouy ce beau TrésorierTresorier
1255Heurter, crier d’une voix forte
Que l’on luiluy vîntvint ouvrir la porte.
Si est-ce que j’aiay si bien faitfaict,
Qu’il ne m’a pris dessus le faitfaict. :
Car quand j’aiay ouïouy ce beau ménagemesnage,
1260Ainsi qu’un homme de courage
J’aiay gagnégaigné le grenier au foin. :
Les jambes servent au besoin,
Encor n’est-il que toujourstousjours êtreestre.
Mais, par dieu, cependantce pendant mon maîtremaistre
1265Est pour les gagesgaiges demeuré,
Et moimoy un peu plus assuréasseuré
Que je n’étaisestois.
Marie.
Hé, Boniface !
VraimentVrayment vous avez bonne grâcegrace,
Encor’ vous vous moquezmocquez des gens.
Boniface.
1270Comment cela ? ce sont sergentssergens,
Qui veulent mener prisonnier
VotreVostre maîtremaistre le TrésorierTresorier. :
Quant à moimoy, j’aimeayme mieux m’en taire.
Marie.
Mais Monsieur le ProtonotaireProtenotaire
1275Est tout seul entre ces soudardssouldars.
Boniface.
Je ne me mets en tels hasardshasars ;,
Je pourraispourrois bien faisant ma montremonstre
Recevoir quelque malencontre. :
Je feraiferay cicy la centinelle.
Marie.
1280Las ! que dira mademoiselleMa damoiselle !
Il m’est à voiravoir qu’elle me suitsuyt.
Hé, Viergevierge Marie, quel bruit !
Je croiscroy que le seigneur Loys
VeutVeult tout tuer.
Boniface.
Il n’est que l’huis
1285Pour bien échappereschapper du danger. :
C’est assez pour m’en étrangerestranger ;,
Par dieu, je n’y retourne pas.
Marie.
Hé, Boniface, parlez bas. :
Je m’en vaisvay jusque à la salette.
Boniface.
1290Quant à moimoy, ma tâchetasche est jàja faitefaicte ;,
Je n’y retourne du jourd’huijourdhuy,
PuisquePuis-que l’affaire j’aiay conduitconduy
--- 103 ---Jusqu’iciicy, j’en suis échappé,
Et Monsieur demeure trompé ;,
1295Qu’il se contente à sa fortune.
Marie.
Elle nous est à tous commune. :
Encor’ en fautfault-il voir la fin.
Boniface
J’en suis bien content ; : mais afinà fin
Que ne m’y pensiez embrouiller,
1300Si l’on me faisoit dépouillerdespouiller,
J’en auraisaurois mon recours sur vous.
ACTE CINQUIÈMECINQUIEME.
SCÈNESCENE I.
[SULPICE]
Monsieur, soyez un peu plus doux !,
Quel profit pourriez-vouspourriez vous avoir
Quand vous le feriez à savoirsçavoir
1305À la justice ?
Loys.
C’est tout un,
Le profit est à tous commun.
Richard
Çà, çà, monsieur le TrésorierTresorier,
Vous en porterez le collier,
Et ce pour juste récompencerecompence
1310D’avoir pillé l’argent de France.
Sulpice
Il se soumet à tout accord.
Richard
Par Dieu, je seraiseray le plus fort.,
Vous viendrez aussi quant-et-quant,
Car vous en faisiez le payment
1315En son nom, m’aidant à tromper. :
Vous ne me pouvez échappereschaper
Que ne vous fasseface mille ennuis.
Le TrésorierTresorier.
ÉcoutezEscoutez moimoy, seigneur Loys,
Vous savez-sçauez que j’aiay faitfaict avance. :
1320Sera-ce donc la récompenserecompense
Que pour moimoy vous voulez choisir,
AprèsApres vous avoir faitfaict plaisir ?
Auriez-vousAuriez vous bien donc le couragecouraige
De m’empêcherempecher en ce voyage,
1325ConsidéréConsideré que mon affaire,
Me contraint comme nécessairenecessaire
Pour le profit de notrenostre Prince ?
Richard
Vous êtesestes sujetsubject à la pince,
Cest cela qui gâtegaste le tout.
Loys.
1330Encor’ en aurons nous le bout ;,
Richard, fais ce que je commande.
Le Treforier
Seigneur Loys, je ne demande
Sinon avoir appointementappoinctement
Avecque vous.
Richard
PremièrementPremierement
1335Il fautfault venir en la prison.
Le TrésorierTresorier.
Je vous feraiferay toute raison,
Si vous faitesfaictes un tour honnêtehonneste.
Richard
Cela n’est que laver la têteteste
De l’âneasne qui est aux BonshommesBons-hommes.
Loys.
1340VoiciVoyci grand cas !, tant que nous sommes,
N’aurons pouvoir de le mener
Au palais pour l’emprisonner.
Richard
Charge-leCharge le-moi moy comme une balle
SurSus le dos, ou comme une malle,
1345Puis nous aurons votrevostre courtautcourtault,
Qui le mèneramenera aussi tôttost
Que commandé.
Sulpice
Soumettez-vousSubmettez vous,
Et puis Monsieur sera plus doux.
Le TrésorierTresorier.
À celle fin d’en voir le bout,
1350Je suis content de perdre tout.
J’aiay payé le quartier passé,
Encore vous aiay-je avancé
CeluiCeluy qui vient ;, pour avoir paix
Avecque vous, Monsieur, je fais
1355Comme si n’eussiez rien reçeureçu.
Sulpice
VraimentVrayment vous ne serez déçudeçeu
Par ce moyen, et de ma part
J’en donnraidonray le vin à Richard. :
--- 106 ---Et si désiredesire faire plus.
Loys.
1360Vous ditesdictes bien. Mais : mais les écusescuz
Que la Constante tient encor’
Pour avoir une chaînechesne d’or ?
Le TrésorierTresorier.
Ces écusescuz vous seront rendus,
Et autant d’autres dépendusdespendus,
1365Pour nous réjouirresjouir tous ensemble.
Sulpice
C’est un bon parti ce me semble.
Richard
Le vin que vous avez promis
À Richard, n’est-il pas donc mis
Parmi le marché ?
Sulpice
Si est bien,
1370Je vous le veux donner du mien.
Richard
Mais j’aimeayme bien mieux dans ma main
Le voir que d’attendre à demain. :
« Car je saisscay bien que les promesses
« De leur naturel sont traîtressestraitresses. :
1375Par quoi,Parquoy si voulez paix à moi,moy
Foncez argent.
Sulpice
Ha,Ha par ma foi,foy
Vous l’aurez, car c’est la raison.
Loys.
Entrons doncques en la maison
AfinAffin de ravoir ma quittancequictance. :
--- 107 ---1380Car je veux du tout assuranceasseurance.
SCÈNESCENE II.
[BONIFACE]
Non, non, Monsieur, si j’eusse étéesté
Dedans notrenostre Université,
Je leur eusse faitfaict à connaîtrecognoistre
Que là-dedansla dedans je suis le maîtremaistre.
1385Encore j’aiay bonne espéranceesperance
D’en avoir un jour la vengeance.
Le ProtonotaireProtenotaire
Mais que diable es-tues tu devenu
Ce pendant ?
Boniface
J’étaisestois détenudetenu
CombattantCombatant contre deux soudardssouldars. :
1390Par Dieu,dieu c’étaientestoient deux grandsgrans pendardspendars
Qui m’eussent arraché la vie
Du corps, si n’eûteust étéesté l’envie
Qu’avaisavoy de vaillamment défendredeffendre ;,
Si bien que je leur aiay faitfaict rendre
1395Tout le courage avec les armes,
Encor que ce feussent gens d’armesgendarmes.
Le ProtonotaireProtenotaire
Par Dieu,dieu je n’aiay susceu si bien faire,
Qu’au plus fort de tout mon affaire
Je n’aye étéesté surpris. Mais quoiquoy ?
1400Il ne se souvient plus de moimoy. :
Car l’ardeur du seigneur Loys,
Qui enfonçaitenfonçoit en bas son huishuys
Pour entrer dedans la maison,
--- 108 ---LuiLuy a faitfaict perdre la raison.
Boniface
1405Non, monsieur, je m’en veux vengervanger.
Le ProtonotaireProtenotaire
Mais, Boniface, en quel danger
Penses-tu que j’étaisestois alors ?
Je t’assureasseure que tout mon corps
ÉtantEstant aussi froid que le marbre,
1410TremblaitTrembloit comme une feuille d’arbre.
Boniface
Ne vous pouviez-vouspouviez vous revancher ?
Le ProtonotaireProtenotaire
Encor’ ne scavaissçavoy-je attacher
Mes chausses chutescheutes aux genouxgenouls.
Boniface
Ha, si j’eusse étéesté avec vous !
Le ProtonotaireProtenotaire
1415Encore me pensant sauver,
Un autre m’est venu trouver
Caché dans la chambre privée. :
Puis Constante y est arrivée,
Ce qui a faitfaict, que me sauvant,
1420Je me suis trouvé au devant
Du seigneur Loys, qui suivaitsuyvoit
Le TrésorierTresorier, qui s’enfuyaitenfuyoit.
Boniface
Quelle mine vous a-il faitfaict ?
Le ProtonotaireProtenotaire
Il m’a ditdict que c’étaitestoit bien faitfaict,
1425À l’homme qui cherche toujourstousjours
Son aventure en ses amours,
--- 109 ---Et que luiluy étantestant pourchassant
De ce dont j’étaisestois joüissant,
Il se pensaitpensoit êtreestre aimé d’elle.
Boniface
1430Comment ! de cetteceste demoiselledamoiselle ?
Sait-Sçaiton pas bien qui est Constante ?
Le ProtonotaireProtenotaire
OuiOuy, et qu’en cetteceste folle attente
Il avoit dépendu beaucoup. :
Mais qu’il voulaitvouloit tout en un coup
1435Son argent, que le TrésorierTresorier
RetenaitRetenoit dessus son quartier,
Puisqu’ellePuis qu’elle étaitestoit ainsi commune.
Boniface
Or la demoiselledamoiselle en aha d’une ;,
L’argent qu’elle vous a prêtépresté,
1440Entre nos mains est arrêtéarresté
Jusque à plus grande récompenserecompense,
Des présentspresens et de la dépensedespence
Que vous avez faitfaict, poursuivantpoursuyvant
Son amour, et dorénavantdorenavant
1445Il se fautfault garder d’y rechoir.
Le ProtonotaireProtenotaire
Boniface, allons nous en voir
Tous les écusescuz de la Constante.
SCÈNESCENE III.
Marie
Loué soit Dieu, tout se contente. :
Et qui plus est, le TrésorierTresorier
1450Ne sera point mis prisonnier,
--- 110 ---J’en remerciremercy’ bien nos amis.
Encore plus il a promis
Pardonner, dont je me contente,
À MademoiselleMadamoiselle Constante,
1455Et à moimoy aussi, promettant
D’en faire encor’ demain autant,
Cela s’entend. M : mais par ma foifoy,
Je regarderairegarderay mieux à moimoy,
Et à mon cas dorénavantd’orenavant,
1460Que je n’aiay faitfaict par ci-cy devant.
Ne vaudra-il pas mieux choisir,
AfinÀ fin de prendre mon plaisir,
Quelque jeune homme, que toujourstousjours
Languir aux misèresmiseres d’amours ?
1465Si faitfaict, pendant que la jeunesse
ÉmeutEsmeut dans mon cœurcueur l’allégresseallegresse
Du doux amour, qui or’ m’enlaceenlasse,
Et duquel déjàdesja Boniface
M’a faitfaict sentir l’ébattementébatement ;,
1470Mais ce sera secrètementsecrettement. :
Car voilàvoyla, l’on n’est jamais sage
Qu’aprèsapres les plaidsplaits. : Cc’est c’est l’usage
Du temps qui court, et pour vraivray dire,
Ma maîtressemaistresse veutveult toujourstousjours rire
1475Au premier venu ;, c’est tout un,
Autant aux nobles qu’au commun. :
Et en cela gîtgist tout l’affaire,
De par Dieudieu. Le ProtonotaireProtenotaire
Dont elle tiraittiroit tant d’écusescuz,
1480Maintenant n’y reviendra plus,
Et voilàvoyla autant de pratiquepraticque
--- 111 ---ÉtrangéeEstrangée de sa boutiquebouticque.
Mais il fautfault aller apprêterapprester
Le banquet. De vous inviter,
1485Messeigneurs, j’auraiauroy bonne envie :
Mais, anenda, la compagnie
Qui est céansceans mangeraitmangeroit bien
Le TrésorierTresorier et tout son bien.
FIN.